Le Comics ODB du Dimanche S02E41. Je vous avais exposé il n’y a pas si longtemps tout le bien qu’il fallait penser du Gotham Academy, co-écrit par Brendan Fletcher et Becky Cloonan. Visiblement ce retour aux sources a donné quelques idées à cette dernière qui continue de délaisser le dessin, à l’exception de quelques covers, au profit de l’écriture. Il n’était donc pas étonnant de voir la pétillante rousse rejoindre le paradis du creator-owned avec Southern Cross, accompagnée du dessinateur Andy Belanger et du coloriste Lee Loughridge.
Avec le #6, se conclut le premier arc de la série. Southern Cross se présente dans ses premiers numéros comme une enquête en milieu spatial. On suit l’embarquement de Braith dans l’aéronef qui donne son nom au titre et qui doit voguer jusqu’à la station de Titan. Son but caché est d’enquêter sur la mort de sa sœur, disparue dans des circonstances assez troubles entre les deux planètes. Une fois à bord, notre héroïne doit se coltiner une faune guère loquace et certainement pas digne de confiance, alors que les mystères s’enchaînent. Derrière les secrets du Southern Cross et de son équipage bigarré, se trouve peut-être la clef à son problème.
Trêve d’expansivité sur le contenu narratif car je vous gâcherais les rebondissements du dernier numéro et dont la rupture de ton est in fine salutaire. Comme à ses habitudes, Cloonan ne fait pas dans le clinquant et amène doucement mais sûrement les enjeux de son titre. Elle parvient en particulier à poser une atmosphère subtilement oppressante, une toile de fond somme toute assez immersive. La narration est également efficace avec un rythme révélations/rebondissements plutôt maîtrisé, et un script peu bavard qui laisse le lecteur avancer dans l’obscurité du Southern Cross. Surtout, sa capacité à glisser dans les registres en embrassant résolument l’angle de la SF en fait une série au ton singulier et accrocheur.
Sur la partie graphique, le trait d’Andy Belanger est clairement dans la veine des productions indés, ni plus ni moins. J’aurais préféré que Cloonan illustre son propre récit, mais après tout, on reste en famille puisque les deux artistes sont en couple. Il est d’ailleurs amusant de noter qu’ils aient (un peu) donné leurs traits aux deux personnages principaux, Braith et le capitaine Mori. La colorisation de Loughridge ne fait pas non plus dans l’esbroufe ce qui tend à plutôt mettre en valeur les lignes de Belanger. L’ensemble est donc correct, avec quelques prises de risque dans les deux derniers numéros qui viennent rehausser la qualité de la prestation.
Southern Cross est jusqu’à présent une jolie petite réussite. Pas de quoi se taper le fondement sur le parquet, mais elle monte en régime et s’offre un final bougrement intriguant qui donne envie de poursuivre l’aventure. Pas dit qu’un éditeur français en acquière les droits, mais si vous n’êtes pas effrayés par l’anglais, les tarauds attractifs d’Image Comics pour les premiers TP pourraient vous faire craquer.