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par Cryma - le 1/03/2014
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par Cryma - le 1/03/2014

Jazz and Cases 6 : De 1960 à 1970 : Tout est permis !

1960 -> 1970 : Le genre se meurt, le Jazz perd de sa popularité, tous les coups sont permis !

Les années 60 marque l'explosion du Rock 'n' Roll qui a définitivement remplacé le Jazz dans le cœur du public. C'est une musique plus dansante, plus linéaire, bref, plus simple. De plus, la musique noire tend à se diversifier, avec l'apparition de la Soul ou du Rythme and Blues, eux aussi de plus en plus populaires. Mais le Jazz n'a pas dit son dernier mot et sa nouvelle « tranquillité » vis à vis du grand public permet aux musiciens de l'époque de tester beaucoup de choses innovantes. Ainsi, trois albums sortis en 1959 vont marqué à tout jamais le monde du Jazz et dicter les codes pour la décennie à venir : « Kind of blue » de Miles Davis qui introduit le Jazz Modal, « The Shape of Jazz to come » d'Ornette Coleman qui installe le « Free Jazz », et enfin « Giant steps » de John Coltrane qui amorce l'Avant-garde

 


 

MILES DAVIS (associé à JEAN-CLAUDE MEZIERES)

Que dire de Davis si ce n'est qu'il est sans doute le musicien ultime. Le seul et l'unique qui aura autant participer à chaque époque importante du Jazz. Il sera ainsi un acteur essentiel du Bebop des années 40, il donnera naissance au Cool Jazz dans les années 50, Il sera un grand praticien du Hard Bop, Il révolutionne le Jazz dans les années 60 avec le modal, il fut l'un des premiers à tirer la sonnette d'alarme dans les années 70 devant la déferlante de « populisme » de la musique noire (le Funk et la soul en tête). A la fin des années 70, il introduit le son électrique du Rock et du Funk au Jazz, et dans les années 80, il est l’icône ressuscitée du Jazz-Rock Fusion,et son album posthume (1992) présente de fortes influences Hip-Hop. Il était donc difficile de lui désigner une décennie particulière... Il est, avec Armstrong, l'une des seule vrais « super Stars » du Jazz, connu de tout le monde. Mais il est avant tout un trompettiste hors norme qui a su, tout au long de sa carrière, parfaire son talent et laisser libre court à son génie créatif. A écouter et ré-écouter, « So What » issu de son album de 1959 : http://www.youtube.com/watch?v=DEC8nqT6Rrk . Pour refléter le génie colossale de Davis, ses envolées lyriques, ses expérimentations artistiques et son innovation constante, j'ai choisi un artiste en avance sur son temps, Mézières. Et plus particulièrement son Valérian (1967), chef d’œuvre de la SF, qui a ouvert les portes à tout l'univers fantastique actuel dans la bande-dessinée. Les plages modale de Davis nous plongent dans ces espaces sombres mais habités de l'espace, que Mézières a su mettre en image comme personne.

 

   

 

ORNETTE COLEMAN (associé à JOHN BUSCEMA)

Coleman est rien de moins que la personnification du « Free Jazz ». L'amorçant avec son fameux album de 1959, il en créer un vrai « manifeste » avec un autre album sorti en 1960 : « Free Jazz : A collective improvisation », les dés sont jetés. Il était un saxophoniste très exigeant, jouant d'ailleurs sur un modèle assez rare, un Selmer Mark VI. Il est vu aujourd’hui comme une figure excentrique et provocante du Jazz, ayant plusieurs fois dynamité le genre, n'hésitant pas à user de la provocation pour faire exister son art. En plus d'être le créateur du Free, il est également considéré comme l'un des inventeurs du Funk. Un aperçu de son talent avec une session de Free Jazz ici : http://www.youtube.com/watch?v=d0HB8ybKJzo . La confrontation entre une musique profonde et un désordre de l’orchestration dont font preuve les compositions de Coleman trouvent leur équivalent en BD avec le Silver Surfer de Buscema. Ce dessinateur incroyable a su parfaitement rendre le chaos qui règne sur terre et qui déstabilise un Norrin Radd issu de l'immensité stellaire. Le chaos humain trouve alors son parallèle dans le chaos psychologique du surfer.

 

   

 

JOHN COLTRANE (associé à JIM STARLIN)

Il est, aux côtés de Parker, considéré comme le saxophoniste le plus révolutionnaire de l'histoire de la musique. Il a, toute sa vie durant, chercher à se dépasser, à parfaire sa maîtrise technique et à explorer de nouveaux modes d'expression. Déjà exceptionnel au temps du Bebop, il trouvera sa voie dans les années 60 en tant que figure de proue de l'avant-garde Jazz, un style rythmique permettant les expérimentations en direct, différent du Free Jazz qui préconisait l'impro totale. Il envisageait le Jazz, et la musique plus généralement, comme une quête spirituelle que tout artiste doit exécuter dans sa vie, se l'appropriant de manière très personnalisée. Il possédait un timbre harmonique et un ton chaud qui font encore tout autant vibrer aujourd'hui ! Personnellement, je suis un tout grand fan de son « My favorite Things » : http://www.youtube.com/watch?v=qWG2dsXV5HI . En matière de BD, je désirai rester dans l'infini de l'espace comme pour les deux précédentes grandes figures des années 60. Je triche un peu et empreinte une création de 1973, le Thanos de Starlin. Il représente bien cette facette « calculatrice » mais « imprévisible » de la musique de Coltrane. Mais Starlin, ce n'est pas que Thanos, c'est avant tout le grand architecte des sagas cosmiques de Marvel avec en tête de peloton « Le gant de l'infini » et, enfin, Starlin c'est l'artiste qui a su le mieux donner vie à Adam Warlock, personnage puissant et téméraire qui semble tout droit issu d'une composition de Coltrane.

 

    

 


 

Gravitent autour de ces trois figures colossales nombres d'artistes talentueux et incroyables qui ont su, eux aussi, apporter de la nouveauté dans le Jazz des années 60. Testant, expérimentant, empruntant à d'autres styles musicaux, se perfectionnant sans cesse, ces artistes, pourtant moins médiatisés, restent essentiels à l'histoire du Jazz.

 


 

ARCHIE SHEPP (associé à BURNE HOGARTH)

Véritable personnage, Shepp est un artiste complet ! Même si il sera essentiellement reconnu pour son incroyable jeu au saxophone (ténor ET soprano), il est aussi clarinettiste et pianiste, il est chanteur, compositeur et dramaturge, enfin, il se fera remarqué dans les années 60 comme figure politique dénonçant les injustices subies par les afro-américains. Il est l'un des tout grands représentants du « New Thing » (un autre nom du Free Jazz) et a longtemps collaboré avec John Coltrane et Cecil Taylor (ci-dessous). Hyper-actif notable, il sera professeur de musique, travaillera avec les plus grands de chaque époque comme Chet Baker, Lester Bowie ou Frank Zappa (pour ne citer qu'eux) et il participera même à un album de Rap français avec Rocé et son « identité en crescendo ». L'un de ses albums emblématiques reste « The magic of Ju-Ju » : http://www.youtube.com/watch?v=hT3-xXM83VM . Pour refléter toute la « sauvagerie » de Shepp, il me fallait un artiste capable d'exprimer ce que l'homme a de plus animal. Hogarth est l'homme de la situation. Il a su, à travers ses recherches anatomiques innovantes, exprimer toute la nature instinctive de l'être humain. Chez Hogart, les impulsions deviennent des muscles et l'inconscient se fait tendon, ce travail incroyable s'observe le mieux dans son magnifique travail sur Tarzan.

 

   

 

CECIL TAYLOR (associé à ART SPIEGELMAN)

Pianiste et poète américain, Cecil Taylor est surtout connu comme co-créateur du Free Jazz. Dans les années 60, avec son groupe « The Unit », il développe de nouveaux styles d'interactions entre les instruments, créant des dialogues musicaux inédits pour l'époque. Il s'est longtemps intéressé à la danse (et plus particulièrement au ballet), tentant, selon ses dires, « d'imiter au piano les sauts dans l'espace que réalisent les danseurs ». Il collaborera d'ailleurs avec plusieurs danseuses et chorégraphes à la fin des années 70. Notons qu'il est aussi un poète reconnu, n'hésitant pas à user de ses création lors de concerts, leur apportant une profondeur toute particulière. Il est aujourd'hui reconnu comme l'un des Free-Jazzeurs les plus influents de son époque, de par ses éclairs de génie en matière d'orchestration et la diversité de ses moyens d'expressions. L'un de ses albums les plus intéressant est sans doute « The world of Cecil Taylor » enregistré en 1960 aux côtés de Shepp : http://www.youtube.com/watch?v=oHkrV06oueA . Afin de coller au mieux à ses artistes « underground » du Jazz des années 60, je désirais leur associé des dessinateurs du même calibre et de la même époque. Figure incontournable du comics underground des années 60, Art Spiegelman débute dans des revues comme Real Pulp ou Young Lust. Aujourd'hui, il est surtout connu pour son chef d’œuvre « Maus » mais ce dessinateur éclectique n'a pas finit de nous épater par sa liberté créatrice. Je l'associe à Taylor pour la légèreté de son trait, l'aération et le génie de ses mises en pages et l'intellectualisation qu'il a su faire de son média.

 

  

 

ALBERT AYLER (associé à GILBERT SHELTON)

Archétype de l'artiste maudit, Ayler ne sera reconnu que trop tard, peu de temps avant sa mort mystérieuse en 1970. Artiste autodidacte et talentueux, il sera repéré par Coltrane qui sera fortement touché par son jeu au saxophone. Toute sa vie, il vivra reclus et rejeté par le milieu, usant de cet « excentricité » dans sa carrière musicale. Il fera le choix d'un son violent, amplifié par des anches très dures et par la mobilisation constante de tout son souffle, reproduisant les transes chères aux negros spirituals. Il usera de la répétition des thèmes simples, tels des cantiques récités dans la douleur, il n'aura de cesse de s'éloigné du principe de mélodie et de rythme afin de jeter toute sa rage et son désespoir à la face du monde. Son travail sera d'abord jugé comme « cacophonie » mais finalement reconnu comme l'une des créations les plus sensibles de la condition noire aux USA et accepté comme un retour aux (malheureuses) sources esclavagistes de son peuple. Son « Ghost » est souvent reconnu comme l'un des manifestes du Free Jazz : http://www.youtube.com/watch?v=dtiSA2RKDzc . Ayler se devait d'être associé à un artiste complètement atypique ! Mon choix s'est porté sur l'une des personnalités du « comix » underground des années 60 : Gilbert Shelton. Grand défenseur des « freaks » et des opprimés , Sheton possède un trait à la fois incisif et sensible, n'épargnant aucunement nos pupille, que ce soit positivement ou négativement. L'importance est avant tout délivrer le message et de s'en donner les moyens, comme le faisait Ayler avec ses expérimentations agressives à l'oreille.

 

  

 

GIL EVANS (associé à ROBERT CRUMB)

Gil Evans (à ne pas confondre avec Bill Evans, voir article précédent), est un pianiste important du Jazz des années 60. Véritable innovateur, il s'intéressera à toutes les tendances du Modern Jazz, jouant du Cool, du Free, et du Modal. A la toute fin des années 60, il sera l'un des premiers à se laisser réellement influencer par le Rock dans ses compositions, augmentant considérablement le nombre de percutions, composant des plages de plus en plus longues où les instruments peuvent s'exprimer pleinement, et utilisant librement des sonorités électriques (guitare, synthétiseur...), allant même jusqu'à ajouter des instruments exotiques et inédit comme le Koto japonais. Le morceau « Blues in Orbit » est une belle représentation des sonorités inédite de l'artiste dans les années 60 : http://www.youtube.com/watch?v=9bZ5xwFUex8 . Pour exprimer toute la créativité et l'électrisante approche artistique de Evans, je voulais un dessinateur lui-même porté par un trait sous tension, presque sismique. Crumb est sans doute l'artiste underground le plus connu du neuvième art ! Il a su, avec ses dessins sans concession et débordant de cynisme, rendre d'une Amérique en mutation à la fin des années 60. Mutation que l'on retrouve dans les albums de Evans à la même époque, révolutionnant son média comme Crumb l'a fait avec le comics. Notons également que Crumb est un très collectionneur de Jazz et qu'il possède sans doute bon nombres de master-pieces d'Evans.

 

  

 


 

Loin des expérimentations et des agressivité sonnores revendiquées par les adeptes du Free, du Hard, du Rock ou même du Modal, certains musiciens préfèrent se laisser pénétrer par les styles à la mode et livrer des albums de Jazz plus doux, plus accessibles, mais tout aussi magnifiques que leurs homologues expérimentateurs. Ainsi vont naître des courants musicaux plus accessibles comme le Soul Jazz ou le Smouth Jazz.

 


 

CANNONBALL ADDERLEY (associé à CHRIS WARE)

Julian Adderley est un saxophoniste de Jazz très influencé par Parker au début de sa carrière. S'émancipant très vite de ce dernier, il va acquérir un style doux et mélodieux, empreint de lyrisme, de légèreté et de rondeur. Il livrera tout au long de sa carrière une sonorité riche et chaleureuse, cherchant à conserver les racines d'un Jazz « populaire », devenant ainsi le chef de file du Soul Jazz. Ce style, influencé par le Blues et le gospel, mais aussi par un instrument particulier, l'orgue (Hammond) et se distingue par des solos moins complexes que ceux du Hard Bop, encore très vivace à l'époque. Il influencera des stars comme Ray Charles, Lou Donaldson ou Marcus Miller. Son fameux « Work Song », bien que précoce, est une pierre angulaire de son style : http://www.youtube.com/watch?v=MmwsQ_dHrFM . Pour transposer la douceur et la « simplicité » de Adderley, je voulais un artiste en marge de son époque. Ware, bien qu'actif dans les années 90, est fortement influencé par une époque qui n'est pas la sienne. La beauté structurelle de ses compositions et son choix d'un retour aux racines en font un bon partenaire pour Adderley.

 

   

 

WES MONTGOMERY (associé à DAVID MAZZUCCHELLI)

Ce guitariste de légende est un grand admirateur de Charlie Christian (voir articles prcédents) durant toute sa jeunesse, développant un style de jeu qui se distingue des autres guitaristes par l'usage du pouce et de la main droite à la place du médiator. Ce touché d'une légèreté rare (d'abord réalisé pour ne pas réveiller ses nombreux enfants la nuit) ne sera plus jamais égalé. Il savait produire un jeu d'une rapidité déconcertante, grattant ses cordes dans les deux sens, produisant ainsi un son reconnaissable entre mille. Il est découvert en 1959 par Cannonball Adderley (ci-dessus) qui lui permet de produire deux disques en solo. Des albums plus tardifs, et souvent jugés comme plus commerciaux, seront à l'origine du mouvement Smooth Jazz. Un extrait du meilleur album de sa carrière, issu donc de la production d'Adderley, « Four on six » : http://www.youtube.com/watch?v=X8Ooy2mzrRk . Pour représenter parfaitement le jeu hyper sensible de Montgomery, je recherchais un dessinateur au trait empreint d'une sensibilité rare. Mazzuchelli est parvenu, dans les années 80, à révolutionner le monde du comics de super-héros avec un dessin tout en subtilité, très éloigné des codes de l'époque. Mazzuchelli réalisera plus tard quelques fleurons du neuvième art, avec, surtout, son fabuleux Asterios Polyp.

 

 

 


A suivre...

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