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par Arno Kikoo - le 26/10/2017
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par Arno Kikoo - le 26/10/2017

Dans l'Antre de la Pénitence, la critique

Based on a true story.

Combien de fois avons-nous lu cette mention précédent quantité de récits d'horreur (généralement, au cinéma) ? Dans l'Antre de la Pénitence ne la porte pas mais se présente comme tel, puisque la BD s'inspire de l'histoire vraie entourant la construction de la Maison Winchester, une demeure qui fut en travaux de façon continuelle pendant plusieurs décennies. La cause ? Les directives de la veuve Winchester, qui était persuadée que les esprits de son défunt mari et de sa fille viendraient la hanter si la construction de sa bâtisse cessait. L'une des maisons réputées hantées les plus célèbres des États-Unis, est donc le point de départ de Peter J. Tomasi pour une histoire sous forme de trip horrifique profondément attirant.

Une réalité au service de la fiction

Lorsque le récit, intialement publié chez Dark Horse, débute, les travaux sont en cours depuis bien longtemps. Tomasi dépeint l'état psychologique de Sarah Winchester qui argumente de façon plus ou moins aléatoire les travaux à faire dans son imposante bâtisse. On nous présente une femme qui tente de rester forte dans son deuil, mais qui cède régulièrement aux pires hallucinations, tentant de racheter dans cette maison les âmes de toutes les personnes tuées par les armes fabriquées par la compagnie Winchester. A côté, on nous découvre Warren Peck, personnage au passé trouble qui ira trouver refuge dans cet enfer de travaux, espérant expier ses péchés dans la fureur et le bruit incessant des marteaux, et la sueur d'un travail acharné. 

Dans l'Antre de la Pénitence propose une sorte de voyage macabre qui accompagne des personnages en perdition, Tomasi jouant sur les défauts de chacun et leurs émotions les plus négatives (colère, remords, deuil) pour proposer une atmosphère à la fois étouffante et à la fois terriblement poétique. Le rapport à la mort et la folie s'illustrent par des envolées hallucinatoires, qui font penser à un conte gothique qui aurait été mis en scène par un Burton croisé à un Del Toro, pour citer des influences graphiques grand public. 

Tomasi raconte également avec ce titre la violence de la société américaine et son rapport à l'utilisation des armes, livrant un message à peine dénonciateur mais qui se conclut par une touche de cynisme assez glaçante. Si l'histoire pourra perdre certains lecteurs par un trop plein de trips hallucinatoires, les amateurs de fantastique et d'une certaine beauté macabre seront ravis. Et notamment parce que Dans l'Antre de la Pénitence profite d'une magnifique aura par Ian Bertram.

De la beauté de l'horreur

L'artiste américain Ian Bertram ne compte pas parmi les plus prolifiques de l'industrie du comicbook. Avec beaucoup de couvertures, l'artiste m'avait marqué lors de courts passages sur les titres Detective Comics et Batman Eternal. Son style démontrait d'emblée une affinité naturelle pour le fantastique et un style très particulier, qu'on pourra rapprocher par certains aspects à du Joann Sfar. Et clairement, Dans l'Antre de la Pénitence apparaît comme une évidence pour le style de ce dessinateur. 

D'un côté, les émotions des personnages transparaissent de façon brute, le trait déformé de l'artiste jouant tour à tour sur l'empathie qu'ils peuvent provoquer, ou sur leur côté de rebuts de toute façon condamnés pour le restant de leur vie. Mais surtout, c'est dans sa mise en scène de l'horreur que Ian Bertram entraîne le lecteur dans une folie qui hante presque chacune des planches. Le dessin est tortueux, organique, et propose des scènes hallucinées parfois proprement glaçantes, mais surtout terriblement attirantes. Il ne s'agit pas d'une horreur faite pour repousser ou effrayer le lecteur, mais de celle qui fascine, qui fait perdre le lien avec la réalité, et nous entraîne dans des visions que seul un esprit dément pourrait représenter. 

De fait, Dans l'Antre de la Pénitence profite d'une très belle édition grand format de Glénat qui permet d'apprécier d'autant plus le style d'Ian Bertram, que ce soit dans la composition de ses planches, qui propose de véritables idées de découpage par moments, que dans son style si particulier. Un style qui, presque par évidence, pourra ne pas correspondre à tout le monde. Chacun se fera son avis, mais on ne pourra pas dire que la proposition de Bertram ne vaut pas le coup d'oeil par son style très affirmé.

Profitant d'une belle édition par Glénat, Dans l'Antre de la Pénitence se présente comme un récit entraînant. Basé sur une histoire réelle, Tomasi et Bertram transforment leur histoire en un voyage halluciné et horrifique qui dégage une atmosphère terriblement séduisante. Malgré un propos pas toujours clair, les planches d'Ian Bertram envoûtent par un style marqué, qui pourra décontenancer certains. Mais pour les amateurs de fantastique, il n'y a clairement pas à hésiter. 

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