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par Arno Kikoo - le 2/11/2017
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par Arno Kikoo - le 2/11/2017

Imperium, la critique

Après une fresque fantastique et des aventures humoristiques, l'éditeur Bliss Comics, qui s'occupe d'apporter en France les publications de l'univers Valiant, s'attaque à Imperium. Décrire le projet en quelques lignes semble bien peu tant la série, regroupée ici dans l'intégralité de ses seize numéros, a des allures de saga que les events et autre crossovers bien identifiables chez DC et Marvel ne renieraient pas. On essaiera malgré tout ici de vous expliquer ce qu'est Imperium, pourquoi il s'agit d'une belle réussite - et pourquoi il s'agit d'un titre important à plusieurs égards.

En préambule, il faudra souligner que la lecture d'Imperium sera conseillée en premier lieu si vous avez suivi la série Harbinger de Joshua Dysart, le même auteur présent sur ce tome. Disponible dans une imposante intégrale (à cinquante euros, un prix appréciable au vu de la quantité, mais qui reste malgré tout un certain investissement), le récit suivait Peter Stanchek, jeune "psiotique" doué de pouvoirs et certainement l'un des plus puissants psiotiques existant, dans une lutte qui l'opposait à Toyo Harada, être à la puissance incommensurable et voulant l'utiliser pour ses desseins. Imperium prend le parti  opposé en se mettant du point de vue du "méchant". Un propos à nuancer puisque Harada souhaite mettre fin à toutes les crises de l'humanité (guerres, famines, pauvreté) en imposant son idéologie utopiste, laquelle ne convient pas au reste de l'humanité - bien qu'elle soit pour le mieux, dira-t-on.

D'un point de vue plus terre à terre, Joshua Dysart nous emmène dans un conflit qui se veut global et qui brasse des thématiques très actuelles. Un propos géopolitique qui nous parle de l'incohérence d'avoir à l'ONU des pays qui sont les plus grands revendeurs d'armes, de la répartition des ressources et des énergies, des crises de réfugiés... La question principale étant "la démocratie fonctionne-t-elle vraiment ?" puisque certains seront bien entendu prêts à défendre le modèle autoritaire de Toyo HaradaDysart brasse des éléments de réponse mais préfère simplement interroger le lecteur, et la lecture d'Imperium se révèle dans cette optique très riche, bien plus que ce que l'on peut voir habituellement dans le comics dit de super-héros.

Bien entendu, Imperium peut aussi se lire de façon plus traditionnelle en se concentrant sur l'univers Valiant, ses personnages, et là aussi Dysart fait preuve d'exemplarité dans son écriture. Parce que Toyo Harada est clairement un anti-héros on ne peut plus fascinant, conscient de la portée de ses actes, et qui agit avec un véritable but, des motivations que chacun pourra comprendre, tout en refusant d'y adhérer. Le cast secondaire n'est pas oublié, faisant intervenir des personnages nuancés qui amènent moult rebondissements et permettent à l'auteur de s'amuser avec tout ce qui est disponible dans ce monde partagé. Ce qui accentue par ailleurs la sensation de grandeur du récit. 

Ainsi, on retrouvera avec plaisir un passage de crossover avec Divinity, personnage nouveau chez Valiant capable de manipuler le temps et au concept hyper riche à explorer (le passage peut même faire tourner la tête par moments), tout comme les Vignes d'X-O Manowar trouvent une implication dans le récit, là aussi passionnant à suivre, grâce à la maîtrise de Dysart. S'il ne fallait reprocher qu'une seule chose, c'est la fin de l'ouvrage qui est assez abrupte et donne un sentiment d'inachevé. Et pour cause, on se doute bien que l'histoire n'est pas tout à fait finie...

Autrement, Imperium a aussi pour lui une batterie d'artistes qui font les beaux jours de Valiant. Dans l'ensemble, les styles ne dénotent jamais trop l'un de l'autre pour assurer une certaine continuité graphique, mais certains sortent forcément du lot. Mention spéciale à Cafu dont les planches sont absolument saisissantes, mais on n'oubliera pas non plus le travail apporté par Doug Braithwaite, que l'on retrouve avec plaisir après ses différents passages dans les grands "events" de l'éditeur. Par appréciation personnelle, c'est plutôt Scot Eaton ou Khari Evans qui laisseront un peu moins pantois mais leurs travaux se défendent malgré tout sans problème. Retenons que la partie artistique est dans son ensemble solide, et sert comme il faut le propos de Dysart.

Imperium porte bien son nom et va largement au delà de ce qu'on pourrait attendre d'une "simple" série. Joshua Dysart joue autant avec l'univers Valiant qu'avec des thématiques qui lui sont chères, et livre un récit chargé en questions politiques et sociétales qui méritent d'être posées, et notamment dans notre contexte. Un récit qui se savoure aussi bien par ses qualités de comics que par les thèmes qu'il pose, Imperium souffre simplement d'un final en dessous du reste - et d'une certaine nécessité d'avoir lu Harbinger avant pour vraiment en prendre toute la mesure. Mais si vous êtes abonnés à Valiant, alors cette nouvelle proposition de Bliss Comics ne pourra que retenir votre attention. 

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