En février dernier on vous annoncait la sortie prochaine de L'Éveil du Maître du Donjon chez Glénat. La BD raconte l'histoire de Gary Gygax, le créateur de Donjons et Dragons. A travers son histoire, on découvre comment le jeu a été créé, quelles sont ses inspirations et les innombrables barrières qui se sont dressées face à ce projet. Plus que l'histoire d'un créateur, L'Éveil du Maître du Donjon est un hommage à toute une communauté de passionnés, qui fera briller les yeux des amateurs de jeux de rôles et même des autres. Après la critique de JB à l'occasion de coups de coeur de la semaine, voici la mienne, par écrit !
Au fait, c'est quoi Donjons et Dragons ?
Avant de commencer cette critique, je vous propose un petit retour sur le concept de Donjons et Dragons, au cas où vous n'êtes pas au point. Il s'agit d'un jeu de rôle où plusieurs joueurs sont guidés par un maître du jeu. Chacun endosse le rôle d'un aventurier dans l'imaginaire fantastique (elfe, nain, guerrier...), et le groupe part pour une campagne de plusieurs heures, parfois plusieurs jours, à la recherche d'un fabuleux trésor par exemple. Point d'écran ou de cartes ici, c'est le maître du jeu qui vous décrit la situation et vous indique vos choix possibles.
Et c'est exactement sur ce principe que se déroule L'Éveil du Maître du Donjon, scénarisé par David Kushner. Un jeu au système révolutionnaire méritait bien une bande dessinée à la narration d'exception. Ainsi, tout fonctionne par voix off. Celle-ci commence par nous raconter la vie des différentes personnes qui sont intervenues dans la création du jeu (dont évidemment Gary Gygax), en s'adressant à nous comme si nous étions le personnage de cette histoire.
Cette narration est vraiment originale et complétement en adéquation avec le thème de l'histoire : ainsi, souvent vers les fins de chapitre, la voix off nous pose des questions du style : "qu'allez vous faire ? Vendre ou continuer ?". Des questions qui donnent vraiment l'impression de jouer à un jeu de rôle, mais qui nous mettent aussi face aux dilemmes rencontrés par les protagonistes.
Une histoire de passions
Parce que oui, la narration est originale mais heureusement ce n'est pas la seule chose intéressante dans cette BD. On suit l'histoire d'un projet fou né au fin fond des États-Unis, et peu à peu pratiqué par des tas de gens différents tout au tour du monde. Une épopée façon american dream, où un petit cordonnier (ou caissier, ou assureur, ou n'importe quel autre boulot qui paye un peu), a réussi à vivre de sa passion, et à transmettre cette passion, à la faire rayonner. En fait, qu'on soit fan de Donjons et Dragons ou pas, L'Éveil du Maître du Donjon est inspirant. Il n'est même pas utile de connaître en profondeur le jeu pour suivre l'histoire.
On va découvrir comment Gygax a eu l'idée de faire s'affronter des armées de figurines en suivant des règles de son invention, puis comment son associé Dave Arneson a pensé à proposer aux joueurs d'incarner un personnage du jeu. On découvre les idées intermédiaires, les projets non aboutis, mais aussi les nouvelles pratiques inspirées par les créations de Gygax (les fondateurs de Blizzard étaient fans de Donjons et Dragons).
Alors certes, l'album n'est pas parfait : artistiquement par exemple, il n'est pas trenscendant. Le trait de Shadmi Koren sur cette oeuvre est assez neutre et la mise en page un peu redondante puisque tout fonctionne par voix off. De plus, certaines fois les personnages de l'histoire interviennent dans le discours du narrateur, ce qui peut porter à confusion car le changement de voix n'est pas indiqué (il aurait fallu des guillemets ou une autre forme de bulle par exemple).
Mais L'Éveil du Maître du Donjon n'a pas pour vocation d'être parfait : il raconte la naissance d'une passion, qui est devenue peu à peu un phénomène mondial. Un phénomène avec ses détracteurs, ses copies, ses fans hardcores et ses références à foison. Un livre à lire pour tous les fans de pop culture, que vous soyez joueur de Donjons et Dragons... Ou pas ! La BD est disponible au prix de 17,50 euros chez Glénat.