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par Elsa - le 15/12/2014
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par Elsa - le 15/12/2014

Magic Pen, la critique

Dans Magic Pen, Dylan Horrocks met en scène un auteur de bande dessinée en panne d'inspiration. Une mise en abyme pleine d'humour, et un bel hommage à la bd, à ses créateurs et à leurs créations.

"Sam Zabel est auteur de bd."

Sam Zabel est auteur de bd. Enfin s'il était tout à fait sincère avec lui-même, il présenterait son métier au passé. L'angoisse de la page blanche est presque devenu son quotidien. Depuis Pickle, l'oeuvre personnelle qui l'a fait connaitre, il ne se trouve plus bon à rien, et alterne périodes où il écrit sans aucune passion les histoires d'une super-héroinestellement rebootée qu'elle a perdue son âme, et passages à vide où il occupe ses journées à s'échapper dans ses rêveries pour ne pas sombrer.

Mais quand le créateur tourne en rond, la création n'a pas toujours la patience de se laisser malmener, voir oublier...

"Du moins il le prétend."

Avec Magic Pen, Dylan Horrocks, auteur de bd, met donc en scène un auteur de bd, qui perd tout à coup le contrôle et devient un acteur parmi tant d'autre d'une création. Comme un lâcher prise face à l'angoisse de la page blanche, l'auteur laisse son imagination aller où elle le souhaite et amener son personnage dans une course folle, pleine d'humour, d'action, de retournements de situations rocambolesques, et de personnages savoureux. On n'a pas une seconde pour s'ennuyer, pas vraiment non plus pour reprendre son souffle, l'auteur nous captive de la première à la dernière page.

Mais derrière son récit, Dylan Horrocks interroge aussi les responsabilités du créateur. Peut-on vraiment tout faire, aligner des mots sur du papier, parfois sans passion, et sans réfléchir aux conséquences de ses actes ? Est-ce que ce ne sont vraiment que des lettres alignées sur du papier, ou la création d'un univers qui, quelque part, devient réalité ? L'auteur a-t'il réellement le droit de s'autoriser tous les fantasmes ? Et sinon, qui le lui interdit ? Au delà même du travail des auteurs, c'est l'imaginaire de chacun que l'auteur remet en question, avec beaucoup de malice et sans jamais être moralisateur, ou même apporter les réponses à ses questions.

Le dessin est un peu rétro, épuré, maitrisé tout en conservant quelque chose de léger. Il évoque à la fois les comics des années 50, qui occupent une grande part du récit, le franco-belge classique qui faisait la part belle à la ligne claire, et le comics indépendant contemporain. Majoritairement axé sur les visages, tout en laissant la place qu'ils méritent aux décors farfelus dans lesquels Sam Zabel évolue, les planches sont pleines d'émotions bousculées, chargées en dialogues tout en restant fluides, et surtout très rythmées. C'est assez étonnant de voir comment Dylan Horrocks parvient à à trouver le parfait équilibre pour nous transmettre énormément d'informations, sur les personnages, les différents contextes, et ses réflexions sur la bande dessinée, tout en conservant beaucoup de dynamisme.

Avec humour, intelligence, et beaucoup de maitrise, Dylan Horrocks livre avec Magic Pen une aventure riche en rebondissements, pleine de personnages particulièrement attachants et un univers qu'on regrettera presque de ne pas visiter plus longtemps, mais aussi une réflexion sur la création, les créateurs, l'imagination et les limites auxquelles il faut, ou non, la soumettre. Un très bel hommage à la bande dessinée classique comme contemporaine, aux artistes plus globalement, et plus largement encore, à tous les rêveurs.

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