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par Alfro - le 15/07/2014
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par Alfro - le 15/07/2014

Petites Cervelles, la critique

Après avoir découvert Minimum Wage, la semi-autobiographie de Bob Fingerman, c'est au tour de Petites Cervelles de débarquer chez nous, toujours grâce aux Humanoïdes Associés. Et si l'œuvre se veut totalement fictionnelle cette fois-ci, la vision de l'auteur transpire de ces pages qui sont une ode à l'absurde.

"Putain la vache, ça fouette !"

Prenez une école américaine typique dans les années 70 (car Fingerman ne peut écrire que sur ce qu'il connait et se sert visiblement de son expérience personnelle ici), pluriculturelle au possible, avec des profs dont tous n'ont pas l'air d'avoir des qualifications ad hoc et une imagerie qui n'est pas sans nous rappeler l'école des Simpson (à croire que toutes les écoles moyennes des États-Unis se ressemblent). Rajoutez à ça des élèves dont le quotient intellectuel est largement supérieur à celui des adultes, ces derniers étant souvent tournés en dérision de toute façon. Et histoire de faire bonne mesure, saupoudrez enfin à tout cela des zombies, résultat d'une expérience d'un prof de biologie qui avait sans doute de plus grandes ambitions qu'une place dans le corps enseignant. Voici des ingrédients pour une bande dessinée qui va s'acharner à appliquer sur tout ce beau monde un regard sarcastique.

Car la volonté de l'auteur n'est clairement pas de faire une BD d'horreur, mais bien de se moquer (pas gentiment) de ces personnages avec le plus de fiel possible. Il faut être raciste ? Allons-y, mais généreusement, histoire de bien faire comprendre qu'on est ici dans le domaine de la dérision. Ainsi, le petit Asiatique a des problèmes de syntaxe évidents et est un spécialiste en arts martiaux. La brute de l'école est un pur demeuré, dont la mère parait dans des revues porno que s'arrachent des élèves dont la précocité laisse perplexe. Les profs sont encore plus gratinés, avec le classique prof de sport (il faudra un jour que l'on les réhabilite les pauvres, la pop culture semblant s'acharner sur eux à chaque fois) qui est un parangon de la bêtise la plus crasse. Ou le directeur, qui se tape en secret sa secrétaire, histoire d'être bien raccord avec son statut. Fingerman a décidé de n'épargner personne, sauf peut-être une classe de surdoués bien trop intelligents pour être honnêtes.

"Peut-être moi montrer toi chin-chin finalement."

Clairement, on se marre tout au long de ces pages si l'on accepte un tant soit peu que l'humour n'est en définitive que ça : de l'humour. De toute façon, Fingerman est offensant envers à peu près tout le monde (même si les bigots en prennent pas mal pour leur grade). Ce n'est pas la BD à mettre entre les mains de ceux qui sont prêts à monter au créneau dès qu'ils sentent poindre une once de politiquement incorrect, pour les autres qui ont envie de se marrer, d'un rire gras ou jaune mais toujours franc, c'est du tout bon. Que ce soit de l'humour de situation ou par des dialogues ciselés, l'auteur nous amène tranquillement dans son délire où les zombies sont prétextes à de nombreuses situations complètement absurdes. D'ailleurs, c'est sans doute cela qui a motivé Fingerman, plus qu'une véritable critique du système scolaire ou même de la société. C'est un peu là où le bât blesse, dans cet humour grinçant qui tourne à vide. Il va volontier taper sur tout le monde, mais sans véritable but derrière ça, comme s'il se justifiait par lui-même.

Plus qu'une véritable critique, Petites Cervelles est un pamphlet qui préfère faire passer un bon moment tout en permettant à l'auteur de son trop plein de fiel. Mais comme Bob Fingerman est un artiste plein de malice, son fiel se transforme en une bonne tranche de rigolade complétement assumée et volontairement brute de décoffrage. Un sommet d'absurde iconoclaste.

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