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par Alfro - le 29/06/2015
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par Alfro - le 29/06/2015

Southern Bastards - Tome 2, la critique

Particulièrement actif, totalement éclectique et surtout d'une constance dans les histoires de haute volée, Jason Aaron est en train de s'imposer comme l'un des scénaristes de comics américains les plus doués de sa génération. Surtout, il confirme qu'il peut aussi bien parler de dieux nordiques que de rednecks abrutis, avec un goût pour les personnages plus vrais que nature.

"Ça vaut le sang versé."

Le premier tome de Southern Bastards nous avait laissé sur un final des plus déconcertants. Alors qu'il était écrit comme un hommage aux revenge movies les plus violents, il tournait court en livrant une conclusion que l'on n'avait pas vu venir, confirmant encore une fois la tendance qu'à Jason Aaron pour détourner habilement les classiques. Si ce premier volume s'annonçait comme une vaste introduction à la véritable épopée revancharde, nous sommes encore pris de cours quand avec ce deuxième tome, qui est focalisé sur Coach Boss, le "vilain" du premier arc. On découvre ainsi son passé avec une suite de flashbacks ainsi que les conséquences de ses actes terribles.

Mais si Aaron cherche à nous montrer d'où vient ce tyran local, à aucun moment il ne cherche à le prendre en pitié où à justifier ses actes. Le scénariste de Scalped préfère nous montrer une vérité crue, sur son personnage en premier lieu, qui n'est pas le vilain classique de comics (Aaron se refuse à ce genre de jugement de valeurs), mais aussi sur cette terre qu'est le Sud profond des Etats-Unis, et en particulier l'Alabama. Une contrée âpre, où la plus grande opulence avoisine une pauvreté terrible, où la violence semble être un moyen des plus légitimes pour régler un conflit, une terre où les hommes ne brillent pas par leur intelligence, puisque la loi du plus fort semble encore être celle qui régit cette terre. Un pays qui a ses codes ancrés en lui et qui rejette tous ceux qui ne seraient pas aptes à s'y conformer.

"Je ne veux pas qu'ils oublient !"

L'Alabama, c'est aussi la terre du football, l'américain. Avec l'équipe de l'université d'Alabama, les Crimson Tide, qui font partie de l'élite du football universitaire depuis des décennies, c'est tout un état qui semble vivre au rythme de ce sport. Du plus haut niveau jusqu'au championnat lycéen qui déchaine les foules et dont il va être énormément question dans ce volume. D'ailleurs, ce n'est pas pour rien si Ryan Kalil, centre célèbre évoluant aux Carolina Panthers, signe la préface. C'est sans doute là-dessus que le public français risque le plus de buter, car les termes sont techniques et certaines métaphores ne seront pas accessibles à celui qui ne connait rien de ce sport (ce qui est quand même courant en France).

Qu'importe, l'histoire d'Aaron va plus loin. Elle raconte la violence, celle qui habite les hommes depuis toujours. Elle raconte aussi comment une communauté vit autour de celle-ci. Bien aidé par le dessin de Jason Latour (auquel on ne pourra que reprocher son choix de camaïeus de rouges pour les flashbacks, qui explosent un peu les yeux à force), Aaron créé le portrait d'une terre qui semble arrêtée dans le temps, comme en vase-clos. Pas de vastes envolées lyriques ici, mais un récit âpre, dur, sans concession. Un récit d'autant plus terrible qu'il raconte une simple histoire d'hommes, mais des hommes aussi fous que fiers. Toute la science d'Aaron, c'est d'étendre progressivement son récit par petites touches, et de promettre de revenir avec une nouvelle histoire qui risque d'être toujours aussi violente. Par contre, cela fait deux fois qu'il termine un story-arc avec la même promesse, va falloir nous la livrer un moment au risque de se sentir flouer.

Southern Bastards est un récit violent, crade et souvent immoral. Le pire, c'est qu'il ne raconte pas l'affrontement de dieux ou autres encapés, il n'y a pas d'Apocalypse zombie ou d'invasion zombie. C'est le réalisme de cette histoire qui rend tout cela encore plus terrible. Comme si Jason Aaron nous montrait cette facette de l'être humain que nous voulons à jamais ignorer, mais qui ressurgit toujours.

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