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par AntoineBigor - le 8/04/2016
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par AntoineBigor - le 8/04/2016

Suicide Squad - Tome 1, la critique

Il fut une époque où la Suicide Squad était une équipe quasi-inconnue du grand public, se limitant aux quelques milliers de lecteurs de ses différentes itérations depuis 1959 et sa création dans les pages de The Brave & The Bold #25. Depuis l'annonce d'une adaptation au cinéma, l'équipe et certains de ses membres gagnent une popularité folle, avant même d'être arrivés au cinéma. DC Comics avait avant cela profité des New 52, en 2011, pour relancer l'équipe, centrée notamment sur Harley Quinn, afin de donner un peu de grain à moudre à Warner Bros. Les premiers épisodes de cette série n'arrivent que maintenant en France, et force est de constater qu'on s'en serait passé.

Il y a maintenant cinq ans, l'éditeur des aventures de Batman relançait tout ses titres et confiait à Adam Glass la nouvelle version de la Suicide Squad, après des années sous la houlette d'un Greg Rucka qui leur a donné une toute autre dimension au début des années 2000. Une nouvelle version qui se veut plus dark et forcément emprunte du projet qui se développe dans les bureaux de chez Warner Bros. Elle met donc en scène un ensemble de super-vilains réunis par Amanda Waller, chef de la sécurité nationale, qui les manipule et les utilise pour différentes missions assez délicates en les menaçant de les faire exploser s'ils ne collaborent pas. Et dans un premier temps, cette dynamique de groupe, docile mais sous la contrainte, marche plutôt bien. Les différentes interactions et relations qu'installe le scénariste fonctionnent et permettent de développer deux ou trois personnages centraux, accompagnés de plusieurs protagonistes jetables. Le rythme est soutenu, les missions le nécessitant, et l'équipe étant forcée, à chaque fin d'aventure, d'y retourner sans pouvoir souffler.

C'est ce qui va être le premier gros point noir de la série : sa structure et son rythme. Si la lecture reste fluide, elle va très vite devenir agaçante dans cette répétition du même schéma qui est : l'équipe est dans la mêlée, la mission se déroule, la mission se termine et Waller les renvoie, ni une ni deux, en mission (avec toujours cette inquiétude "vais-je exploser" qui revient sans cesse, alors que non). Si elle marche dans les premiers épisodes, la répétition va devenir lassante dans son incapacité à construire une intrigue sur le long terme. Les mission s'enchaînent avec trop peu de liant pour avoir de l'intérêt. D'autant que les personnages jetables, une fois jetés, ne sont jamais remplacés par de vrais caractères qui pourraient porter le titre. Seul Deadshoot, Diablo et Harley semble développés un minimum pour cadrer comme ils peuvent cette équipe de bras cassés. On notera une apparition sympathique de Captain Boomerang, mais qui n'arrive finalement que pour répéter une trahison, déjà exploitée dans l'épisode précédent. Beaucoup trop de redite, donc.

Passé le premier arc en cinq numéros, Adam Glass va prendre un peu plus de liberté sur les deux derniers épisodes en s'attaquant au passé d'Harley et à sa relation si particulière avec le Joker. Une prise de risque timide, mais nécessaire pour apporter une patte et une réelle épaisseur au personnage. Ses motivations ainsi que son tempérament apparaissent comme autant d'éléments intéressants à exploiter... Avant de se transformer en un récit bateau, qui rate complètement la caractérisation de son anti-héroïne. Là où l'essence même de Queen réside dans une candeur, un romantisme et une folie particulière - on les doit à Paul Dini et Bruce Timm dans Batman : The Animated Series et l'intemporel chef d'oeuvre Mad Love - le scénariste opte pour une modernisation assez grossière, voulant la rendre plus forte psychologiquement avant d'en faire un clone du Joker complètement désincarné et beaucoup trop sexualisé pour être honnête. Un premier pas vers la Harley Queen moderne, que l'on espère voir prendre une autre direction dans la nouvelle relance éditoriale de DC Comics, Rebirth.

Il est vraiment dommage d'être passé à côté de cette modernisation de cette équipe d'anti-héros, tant le potentiel du concept semble ouvrir de nombreuses portes assez originales. Il manque surtout une vraie cohérence d'équipe et une vraie idée directrice derrière le titre, qui se contente d'une succession de missions assez inintéressantes. D'autant que  le scénariste n'est pas aidé côté graphismes, avec six dessinateurs différents pour sept épisodes, certains étant illustrés à quatre mains. Si tous les styles se ressemblent entre eux, certains artistes n'ont pas le même niveau que d'autres et pèsent sur la lecture. On en retiendra toutefois certains, comme Cliff Richards ou encore Frederico Dallocchio (qui rappelle par moment le style d'Andrea Sorrentino), mais l'ensemble est beaucoup trop inégal pour porter un scénario déjà trop peu solide.

Cette nouvelle version de la Suicide Squad manque clairement de quelque chose : de consistance, de personnages forts, d'une ligne directrice ou encore d'un dessinateur régulier. En l'état, le titre est bancal, enchaîne l'action sans y amener beaucoup de sens et perd clairement son temps à réinstaller, en moins réussis, des éléments ou des vilains qui n'en ont pas besoin. Reste une lecture assez fluide, et quelques indices sur la dynamique que pourra avoir l'équipe au cinéma. On vous conseille plus d'attendre les épisodes de John Ostrander qui seront réédités en août, mais ce premier tome de Suicide Squad reste une assez bonne introduction au concept.

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