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par Alfro - le 19/06/2014
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par Alfro - le 19/06/2014

The Sixth Gun - Tome 1, la critique

Urban Comics ne se contente pas de ses bat-titres et continue de prospecter au-delà des seuls comics de DC Comics. Nouvelle pépite indie à rajouter à leur catalogue, The Sixth Gun a le mérite d'arriver chez nous précédée d'une solide réputation, celle d'avoir révélé son scénariste Cullen Bunn mais aussi d'être l'une des séries les plus vivaces d'Oni Press puisqu'elle en est à son 41ème numéro de l'autre côté de l'Atlantique.

"Mon assassinat m'a affaiblit."

Le principe de base de The Sixth Gun est de mêler les genres du western et du fantastique. De façon claire et explicite, ce n'est pas un western avec une once de fantastique. Dès le premier chapitre, nous avons le droit à notre lot de zombies et de revolvers magiques, et cela n'ira qu'en "s'empirant" tout au long de l'histoire. D'ailleurs, ces revolvers magiques sont le moteur de ce premier tome, où l'écriture tourne autour de ces artefacts, puisqu'ils sont les enjeux, les mystères et la résolution des intrigues. En gros, Cullen Bunn a recréé ici une écriture rappelant les quêtes épiques de la fantasy, où l'artefact est le moteur de l'histoire (le Graal, l'Anneau, toutes les bizarreries passant par la tête de Terry Pratchett), a placé cela dans un contexte de western et a saupoudré le tout de créatures fantastiques et de magie noire. Un beau melting-pot qui donne un aspect original à son histoire mais qui a le désavantage de délaisser le contexte au profit de la folie créative. Si l'on se promène dans les habituels saloons et forts de rondins, on aurait très bien pu remplacer ces décors par d'autres. Même l'histoire basée sur les retombées de la Guerre Civile ne s'appuie que légèrement sur les éléments historiques. Ce qui importe clairement à Bunn, ce sont les événements plus que le théâtre dans lequel il a placé son histoire.

En revanche, question événements, nous sommes servis. Le récit avance au rythme d'un galop effréné. Si l'on se coltine trois pages d'introduction assez frustes, à partir du moment où le anti-héros Drake Sinclair va trouver auprès d'un arbre qui abrite les fantômes de pendus l'information qu'il cherchait depuis semble-t'il un certain moment, jamais plus l'histoire ne ralentira. Si le récit emprunte sa construction à celle d'une œuvre de fantasy, le rythme est clairement tiré d'un blockbuster. Le contexte s'étoffe avec parcimonie, dans les rares moments d'accalmie, le reste n'est que fusillades, chevauchées endiablées et irruption violente de créatures en tout genre. D'ailleurs, Bunn ne prend pas trop la peine de donner une consistance à son aspect fantastique. De vagues allusions aux ténèbres et à une certaine tradition lovecraftienne (ténue mais présente, comme chez tout scénariste américain il semblerait), et l'affaire est emballée. À vrai dire, on ressent fortement la crainte du scénariste, qui peu sûr de pouvoir faire plus de six numéros s'est acharné à livrer un premier tome qui se tient en un tout, alors même qu'il installe certains éléments qui prouvent qu'il avait prévu bien plus dès le début. Un épilogue arrive à la fin et montre que Oni Press ne se serait pas tiré une balle dans le pied en ne reconduisant pas l'une de leurs séries qui a le mieux marché depuis Scott Pilgrim.

"Aucune arme au monde n'est naturelle."

Quand on ne développe pas le contexte pour laisser le récit s'exprimer, il faut pouvoir s'appuyer sur des personnages hauts en couleurs et suffisamment intéressants pour accrocher le lecteur. De ce côté là, nous sommes servis. Entre le héros qui est une vraie crapule, Becky, jeune femme qui découvre un nouveau monde terrifiant que son père lui avait toujours caché, et surtout une pléïade de vilains, tous plus inquiétants les uns que les autres, c'est une galerie de fortes gueules qui justifie à elle seule d'avoir placé cette histoire au sein d'un univers de western. Surtout que le Général Oliander Bedford Hume est un vilain ultra-charismatique, ancien héros de guerre des confédérés (le camp des perdants) aux méthodes sanguinaires qui revient ici en zombie assoiffé de pouvoir et dont la montée en puissance tout au long des chapitres en fait un ennemi impressionnant. D'autant plus que le dessinateur Brian Hurtt s'attache bien à lui donner toute sa consistance, une présence maléfique qui exsude de sa folie et lui permet de crever les cases de la bande dessinée. Hurtt sert par ailleurs bien ce récit avec un dessin clairement inspiré par Mike Mignola (on ne saurait trop reproché à un artiste de s'inspirer des meilleurs) et livre une prestation dynamique et noire à souhait.

The Sixth Gun est une œuvre dont l'originalité est d'avoir transporté un récit de fantasy dans le territoire du western. Si cela ressemble dans ce premier tome à un prétexte de scénariste, c'est surtout que Cullen Bunn a lâché la bride à son histoire qui fonce frénétiquement de retournements de situations en moments de purs délires. Un blockbuster séquentiel qui permet de poser les bases d'une histoire qui continuera à paraître chez Urban Comics (le tome 2 sort dès le mois prochain) qui a le temps de voir venir puisque Bunn n'a visiblement pas l'intention de mettre tout de suite le point final à sa série.

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