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par Sullivan - le 22/01/2015
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par Sullivan - le 22/01/2015

Walking Dead - Tome 22 : une autre vie, la critique

Sur une pente ascendante aussi bien qualitativement que commercialement depuis quelques numéros, Walking Dead avait à coeur de prouver à son fidèle lectorat que l'embellie n'était pas de courte durée avec le Comics le plus vendu de France et que malgré un léger passage à vide de quelques tomes avant le début de l'arc de Negan, Robert Kirkman en a encore dans le ventre, mais surtout plein la tête. Accompagné par un Charlie Adlard retrouvé depuis qu'il est assisté (les mauvaises langues n'ont pas fini de chambrer) par un Stefano Gaudiano aussi efficace que discret, le scénariste signe ici l'un des plus beaux tomes de sa série, que Delcourt sera fier de présenter en avant-première la semaine prochaine, à Angoulême. 

"Au fond de toi, tu sais que tu aurais dû me tuer. La civilisation, c'est un truc qui te fait bander."

Une fois n'est pas coutume, ce nouveau tome de Walking Dead s'ouvre par un immense flashforward, un bond en avant temporel que les amateurs de séries n'auront aucun mal à aborder, et qui offre d'emblée une richesse narrative à la nouvelle société imposée par Robert Kirkman. Celle-ci se découvre à mesure que les situations s'enchaînent, sans jamais prendre le lecteur par la main, laissant ce dernier découvrir ce nouveau monde et ses ramifications à mesure que la narration prend la peine de nous le présenter. Autre petite révolution scénaristique : le récit nous offre un découpage entre trois points de vues, complémentaires et aux antipodes les uns des autres, comme pour mieux élargir le spectre de ce nouveau statu quo, que l'on nous place de manière floue comme "quelques années plus tard". Rick Grimes, héros de la lutte face à Negan et utopiste profond, n'assume pas tellement sa nouvelle renommée et se paye même le luxe d'un nouveau look, comme pour mieux souligner ce passage à une nouvelle époque pour les auteurs, ainsi que son rejet profond du statut de sauveur. 

Combattant autant que faire se peut la pyramidalité du vivre ensemble et oeuvrant pour (re)bâtir une société saine, le leader né n'oublie pas son rôle de père, lui qui fait aujourd'hui face à un Carl adolescent et entre deux chaises, alors qu'il réclame à corps et à cri son besoin d'aller travailler au Moulin. C'est là aussi que se trouve la finesse d'écriture du scénariste, qui sans jamais insister sur l'évidence, nous présente une société qui manque de munitions, plusieurs années après avoir lutté contre des tonnes de morts-vivants qu'il faut bien exterminer, qui doit être capable de fournir suffisamment à manger à ses citoyens et qui redécouvre tant bien que mal le quotidien, presque débarassé de la menace latente des Zombies. Évidemment, rien n'est aussi simple et si le numéro avance sur un rythme presque feuilletonnant, ses dernières pages vont tout changer. 

En effet, le tome qui regroupe les numéros 127 à 132 de la série se termine sur un cliffhanger qui, alors que l'on croyait s'habituer à ce 7 à la maison revisitée à la sauce post-apocalyptique, bouleverse le statu quo installé le temps d'un petit tome seulement, emmenant dans son sillage un nouveau grand danger pour l'utopie citoyenne de Rick Grimes.

"Les morts, c'est eux qui parlaient !"

Du côté du dessin, on notera là aussi une petite révolution. Très généreux, ce tome offre son lot de double-pages toutes plus réussies les unes que les autres, mais surtout, il nous donne enfin la finesse à laquelle nous avait habitué Charlie Adlard avec l'apogée de la série, autour de son Tome 8. Aidé par un Stefano Gaudiano salvateur, le Britannique enchaine les cadrages angoissants et les représentations qui font froid dans le dos, comme pour mieux développer une paranoïa souvent mal placée du lecteur, qui en vient, à l'instar des protagonistes, à douter du paraître de chacun des personnages de la série. 

Forcément concerné par la nette progression de l'édition de Comics en VF depuis quelques mois, Delcourt y va aussi de ses améliorations et propose, en fin de volume, une galerie de couvertures intégralement en couleurs. Une première pour la série que l'on accueille à bras ouverts. Dernier détail, et pas des moindres : la localisation du titre est parfaite et, une fois de plus, ce diable d'Edmond Tourriol parvient parfaitement à saisir le phrasé des survivants, pour mieux faire résonner le réalisme cru de l'écriture de Kirkman. Une franche réussite. 

Brillant dans le fond comme dans la forme, Walking Dead - Tome 22 est à ranger aux côtés des meilleurs tomes de la série. Résolument différent, ce volume de transition fait son travail à merveilles et nous offre une démonstration de narration par un auteur que l'on a plaisir à retrouver à un tel sommet de qualité. Comme toujours disponible pour Angoulême, ce vingt-deuxième tome chamboule les habitudes des lecteurs, qui vont maintenant devoir (dé)composer avec un monde absolument bouleversé. Walking Dead tel que nous le connaissions depuis longtemps a disparu. Définitivement ? 

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