Après l'excellent Amère Russie, Aurélien Ducoudray et Anlor s'associent pour un nouveau diptyque : À coucher dehors.
Histoires de famille.
Amédée est SDF. Lui et ses deux amis, Prie-Dieu et Merguez, vont se faire expulser du pont sous lequel ils vivent quand un notaire débarque. Il leur annonce qu'Amédée a hérité de la maison de sa tante. Une seule condition pour l'obtenir : s'occuper du fils de la défunte, Nicolas.
Nicolas est trisomique. C'est aussi un jeune homme passionné par l'espace et qui a pour héros Youri Gargarine. Il se rêve cosmonaute. Veiller sur lui ne va pas être de tout repos.
Entre rêves et gros problèmes.
Aurélien Ducoudray est un scénariste au talent rare. Ses histoires sont pleines d'humanité, alliant justesse et sensibilité. Avec Anlor, ils forment un duo très réussi, tant la dessinatrice sait, elle aussi, raconter l'humain et ses émotions. À coucher dehors choisit pour héros des laissés pour compte. Des SDF, un jeune homme handicapé. Ceux qui jamais ou presque dans la fiction ne sont des véritables héros. Les auteurs leur donnent vie avec aisance, intelligence. Ils sont comme n'importe qui. Comme dans la vraie vie. Attachants, drôles, émouvants, énervants. Tentant de bricoler avec ce que la vie leur offre.
Ce premier volume (sur deux) introduit les personnages. Il prend le temps de nous les raconter tout en ne lésinant pas sur les rebondissements. On ne s'ennuie pas avec Nicolas qui disparait plus vite que son ombre, uniquement concentré sur son rêve et déboussolé par le décès de sa mère. Et Amédée a fort à faire. En plus de devoir le retrouver, sa fortune soudaine attire les jalousies (et les ennuis) pendant que son passé et ses secrets ressurgissent sans qu'il ne puisse le contrôler. Chaque personnage, même le plus secondaire, a une histoire et une personnalité forte. Ils s'associent tous pour une aventure à la fois réaliste et hors-du-commun, dont ni eux ni le lecteur ne tout à fait sortiront indemnes.
Les planches d'Anlor sont pleines d'énergie et d'émotions. Il se passe énormément de choses à chaque page mais la lecture est aussi fluide qu'explosive. Tout comme côté scénario, le dessin se partage entre tragique et comique sans jamais tomber dans la facilité, sans jamais édulcorer ce qui n'a pas besoin de l'être. Les sans-abris, le handicap, deux sujets souvent tabous qui ici sont traités comme ils devraient toujours l'être : simplement. Nicolas, Amédée et ceux qui les entourent rient, souffrent, rêvent, trichent parfois pour donner plus de couleurs à la vie. Avec ce premier tome, ils déboulent dans notre vie pour, certainement, ne jamais totalement en sortir.
Ce premier tome d'À coucher dehors est une jolie pépite. Un récit drôle et sensible, plein de vie et d'émotions. Une bande dessinée qui bouscule les idées reçues et file à toute allure vers les étoiles.