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par Elsa - le 22/10/2014
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par Elsa - le 22/10/2014

Avant d'oublier, la critique

Après Les Amandes vertes, Delphine et Anaële Hermans reviennent avec Avant d'oublier, une bande dessinée qui parle de rencontre, de transmission et de nos vieux.

"Et si j'étais passée à côté de mon grand-père ?" 

C'est à la mort de son grand-père que l'héroïne réalise véritablement qu'elle ne connait rien de lui. Parce qu'à ses yeux il n'était qu'un raciste rétrograde, elle a toujours gardé ses distances. Elle se demande si elle n'a pas manqué quelque chose, maintenant qu'elle n'aura plus l'occasion de faire plus ample connaissance avec son aïeul.

Lui vient alors le besoin de rencontrer des vieux, de les connaitre, de remonter le fil de leur vie, pour, entre les lignes, un peu mieux connaitre son grand-père aussi. Au hasard des propositions de ses proches, elle va découvrir tour à tour le passé de l'épouse d'un entrepreneur belge au Congo, du temps où le pays était une colonie, d'une résistante, d'un immigré italien venu en Belgique pour devenir mineur, et d'une artiste décidée à ne jamais se laisser dicter ses choix de vie.

"Je me dis soudain que le monde change plus vite que les hommes."

Avant d'oublier est à la fois un regard sur le fossé entre les générations, et une manière de mieux connaitre, par petites touches, l'Histoire de la Belgique, des années 30 à nos jours. L'héroïne cherche à rattraper le temps perdu avec son propre grand-père d'une manière étonnante et pourtant judicieuse. En parlant à des inconnus, elle prend plus de recul et réalise que la société dans laquelle chacun grandit, puis vit, influence sa manière de voir le monde, de penser et d'agir. Pas une excuse, mais une explication objective aux remarques qu'elle a pu l'entendre prononcer.

Elle voit aussi que l'écart est grand entre l'Histoire telle qu'elle est racontée dans les livres, pleine d'une succession de faits, et la vraie vie, dans son quotidien, ses émotions, ses joies et ses peines.

Le récit se compose des rencontres réalisées par l'héroïne, et de ses réflexions personnelles entre chacune d'entre elles. La colorisation rythme cette construction. Chaque rencontre a une couleur différente, et les moments où elle est seule sont en gris. Le choix de couleur appuie à chaque fois le récit. Le dessin est doux, un peu naïf et touchant. 

On regrettera peut-être que les réflexions de l'auteure restent un peu en surface. Mais plutôt que d'en faire une frustration, il faut voir Avant d'oublier comme une porte ouverte. Sur l'Histoire, et sur les générations qui nous précèdent, et avec qui nous avons encore la chance de discuter. Comment mieux comprendre aussi bien le monde qui nous entoure que ceux que nous aimons qu'en échangeant avec ceux qui ont vécu avant nous ? C'est le genre de livre que l'on renferme avec l'envie de prendre un thé avec ses grands-parents le plus vite possible.

Avant d'oublier est une bande dessinée simple et multiple. C'est une piste de réflexion où les réponses restent à l'état d'ébauche, nous invitant ainsi à nous aussi chercher à comprendre ce qui a fait que les vieux qui nous entourent sont devenus ce qu'ils sont, à travers la société dans laquelle ils ont vécu et qui les a en partie modeler. C'est aussi un regard sur la vieillesse plein de curiosité, à mille lieux de celui dont on a l'habitude.

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