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par Sullivan - le 13/11/2013
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par Sullivan - le 13/11/2013

Blacksad Tome 5 - Amarillo, la critique

Presque 3 ans jour pour jour après la sortie de l'Enfer et le Silence, quatrième album du déjà culte Blacksad de Diaz Canales et Juanjo Guarnido, les plus Français des Espagnols sont de retour vendredi avec un cinquième volume sous forme de ruée vers l'ouest, où le monde de la musique laisse la place à d'autres arts : ceux de l'écriture et du cirque. Une heure et 48 pages plus tard, que reste-t-il de ce qui restera sûrement comme l'une des plus grosses sorties BD de l'automne, malgré le colosse Astérix ?

"La poésie et les couilles."

D'entrée, Canales et Guarnido posent les bases : ce cinquième volume de Blacksad va aller aussi vite que le bolide piloté par le chat détective le plus cool de l'art séquentiel sur sa couverture. Une introduction en forme de message aux lecteurs où le 4ème mur semble fissuré donne le ton d'auteurs que l'on sait amoureux de leur indépendance : "Donne une bonne fin à ton histoire ou laisse ton rouleau dans les toilettes, là où il pourra servir à quelqu'un." Au delà de la pirouette scénaristique qui va ouvrir et conclure le récit, on peut ici lire la crainte de deux géants friables, inquiets de ne pas livrer une fin à la hauteur pour leur série déjà légendaire. Rassurez-vous, le sixième volume est déjà annoncé en plus d'être, peut-être, une suite à l'aventure qui nous attend aujourd'hui.

Et si le récit file à la vitesse du bolide Texan du héros pour le meilleur, c'est aussi son plus gros défaut. L'ambiance semble moins posée que dans les volumes précédents, moins intimiste aussi. Certes, le format du road-trip ne permet pas de livrer un polar respectueux des codes de son genre, mais impossible de ne pas regretter le déroulement bien trop classique/facile d'un récit qui tourne finalement autour de Chad, un écrivain meurtri par son manque de confiance en lui et sujet clinique pour tous les guêpiers de la vie.

" Les romans, c'est de la merde. La vie, c'est encore pire — Chad"

Et comme l'osmose entre les auteurs reste le moteur du joyau de Dargaud, on ressent ce manque de voluptée caractéristique également dans le dessin de l'incroyable Juanjo Guarnido, qui souffle le chaud (quelques cases et plusieurs pages absolument fabuleuses) et le froid (un manque de détails flagrant sur certains gaufriers peu inspirés). Un froid que l'on ne lui connaissait pas sur sa série phare, et qui interpelle plutôt qu'il inquiète.

La seconde moitié du récit reprendra d'ailleurs la route du succès pour livrer une résolution certes simplissime, mais diablement efficace, ponctuée d'un humour aussi fin que le trait du dessinateur. Passant brièvement mais efficacement sur des sujets de sociétés tels que les droits des noirs, les auteurs offrent une jolie carte postale d'Etats-Unis fantasmés et décorum parfait pour l'action de cette cinquième pépite. Plus étonnant, le récit se permet même de s'ouvrir sur sa conclusion, nous laissant espérer une relation Casino Royale/Quantum of Solace pour un sixième volume que l'on espère voir renouer avec le génie du second tome, qui reste aujourd'hui le véritable maître-étalon de cette production Franco-Espagnole fabuleuse. 

"Qu'est-ce que tu fais ? Un bien beau geste, j'espère"

Amarillo est une réussite frustrante. Une réussite parce que l'éxécution de deux artistes déjà couronnés est une fois de plus proche de l'excellence, mais terriblement frustrante parce que le récit en avait autant sous la pédale que son héros de Blacksad. Solide et formaté pour plaire aux amoureux de la série, ce volume n'en restera toutefois pas le coup d'éclat, à défaut d'avoir calmé notre soif de Bande Dessinée noble, belle et intelligente pour quelques temps. 

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