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par Republ33k - le 20/05/2016
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par Republ33k - le 20/05/2016

Le Bourreau - tome 1, la critique

On ne va pas vous le cacher, lorsque Delcourt nous avait présenté son Bourreau à l'occasion de son habituelle conférence à Angoulême, nous n'avions pas été emballés par le pitch, loin de là. Il faut dire que celui-ci paraissait encore un peu nébuleux, et que la couverture dévoilée renvoyait directement à l'imagerie de la saga  vidéo-ludique Assassin's Creed. A l'heure où fleurissent des œuvres toujours plus opportunistes dans un média pourtant né pour être plus créatif que le jeu-vidéo ou le cinéma, nous avions donc décidé de mettre Le Bourreau dans la catégorie des titres à surveiller, mais sans plus. Qu'il est bon d'avoir tort, nous le prouvent ce mois-ci Mathieu Gabella (scénario), Virginie Augustin (storyboard), Julien Carette (dessin), Jérôme Benoit (décors) et Jean-Baptiste Hostache (couleur) avec premier tome.

Certes, le titre semble surfer sur la vague déclenchée par le séisme Game of Thrones, qui a lancé une vraie mode de la Fantasy nuancée par un aspect historique et/ou politique importants. Certes, les pages de ce premier tome ne sont pas rappeler les grandes heures du jeu phare d'Ubisoft. Mais tout le reste est inédit, ou du moins, original. Bienvenue dans le monde du Bourreau, un guerrier au service de puissants parisiens, qui semble avoir développé des capacité extraordinaires, parmi lesquelles, une force et une résistance incroyables, mais aussi, et surtout, la capacité de "convoquer" ses victimes à l'heure et l'endroit qui l'arrange le plus. Un don - c'est d'ailleurs comme ça qu'il le nomme - qui aide bien notre assassin de protagoniste.

Page après page, Mathieu Gabella nous dévoile sa création, dans une série de petits rebondissements toujours efficaces, qui sont délivrés par une narration assez sinueuse : flashback, monologues intérieurs croisés et autres astuces sont au programme et permettent à l'auteur d'en dire beaucoup en peu de pages - elles seront 56 dans ce premier tome. Pourtant, on termine la lecture sans trop en savoir, trop en découvrir. Il faudra ainsi reconnaître au scénariste un vrai talent dans la gestion du mystère, qui s'adapte admirablement bien à l'intrigue. Les réponses convoqueront ainsi toujours d'autres questions, jusqu'à un cliffhanger comme il en existe des tas, mais qui au sein du récit, restera efficace.

Accompagné dans cet univers par le dessinateur Julien Carette et la storyboard artist Virgine Augustin, le scénariste nous propose une vraie curiosité, dans l'action comme la narration, d'ailleurs. Et si on pouvait craindre la comparaison avec un Assassin's Creed ou un Roy des Ribauds, par exemple, Le Bourreau tient plus d'une réinvention assez inspirée du mythe des super-héros et super-vilains, dans les rues d'une Paris médiévale. En témoigne une fascination évidente des auteurs pour les pouvoirs de leurs protagonistes, qui d'abord incongrus, sont très bien intégrés dans les recit et ses rebondissements. La "convocation" du Bourreau permet d'ailleurs quelques effets de mise en scène que le dessinateur ne manque pas d'éprouver dans des passages assez poignants.

Il est vraiment difficile d'en dire plus sans vous priver des différentes réjouissances de cet album, qui malgré des influences assez explicites, tire très vite son épingle du jeu, pour développer un univers des plus intriguants, voire des plus prometteurs ! Ce qui n'empêche pas ce premier tome de souffrir de défauts de jeunesse, cependant. Tout d'abord, si les dessins sont plaisants - et font visiblement bon usage de le présence d'un storyboard artist - quelques planches sont un peu en reste, ou manquent d'uniformité entre le premier et les autres plans, ce qui a tendance à créer cet effet de "mise au point" devenu récurrent dans la bande-dessinée franco-belge contemporaine.

Ensuite, quelques outils d'immersion se révèlent être à double tranchant. Le scénariste mettant en scène un assassin illettré, il se lance volontairement dans des phrases sur lequel le lecteur va buter. L'idée est louable, et entend nous plonger dans le quotidien du protagoniste, seulement, elle aura parfois tendance à générer un effet inverse à celui recherché, à savoir, nous sortir de l'album. Dans le même ordre d'idée, quelques trouvailles de narration, au sein d'un album par ailleurs plutôt classique dans sa façon de raconter une histoire, sont parfois aussi appréciables que déroutantes.

Le Bourreau est victime de petits défauts, ça et là, qui ne sont jamais que le prix à payer pour apprécier pleinement l'originalité de cet album. Nous ne tiendrons donc guère rigueur au scénariste et ses artistes pour ces quelques heurts. Car derrière eux se cachent un univers potentiellement riche et en tous cas rafraîchissant, des personnages attachants et quelques promesses qu'on à hâte de voir tenues dans les deux prochains volumes, attendus pour 2017. Un fascinant et nerveux mélange de contexte historique et de fantasy, qui saura ravir les lecteurs habitués de ces deux genres.

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