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par Alfro - le 28/05/2015
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par Alfro - le 28/05/2015

Le Guide Sublime, la critique

Des fois, il est important de juste se marrer un bon coup. Pour cela, quoi de mieux que l'histoire d'un dictateur sanguinaire et complétement timbré ? Bon d'accord, ce n'est pas forcément le sujet auquel on aurait pensé en premier lieu pour se fendre la poire, mais Le Guide Sublime nous prouve encore une fois que l'on peut rire de tout, même du pire.

"Matériellement, c'est possible de les tuer tous ?"

Le Guide Sublime se présente dans cette très belle édition de Dargaud comme un petit livre rouge. Toute référence à un élément existant est évidemment volontaire. Pas de Mao ni de Staline ici, ni même d'Hitler ou autre Mussolini, le dictateur Sublime n'affiche pas forcément son idéologie. Fasciste ou soviétique, bien peu lui importe. Ce n'est pas l'idéologie qui le définit mais comment il use de son pouvoir totalitaire. Et là, on a le petit précis du dictateur sociapathe. Fou, frustré sexuellement, colérique et complétement con, Sublime est un modèle d'être humain particulièrement défaillant. Ce qui n'est pas forcément avantageux pour le peuple puisqu'il a aussi les pleins pouvoirs.

Fabrice Erre s'y connait bien en satire. Il s'est même spécialisé là-dedans dans sa carrière parallèle d'universitaire. Ce professeur d'histoire a même fait une thèse sur la presse satirique lors des révolutions françaises. Autant dire que faire grincer des dents sur les errements des puissants, c'est un peu son truc. Alors quand il invente un tyran, il ne peut s'empêcher d'y mettre beaucoup d'aspects qui nous rappellent d'autres détraqués politiques qui se sont mis en tête qu'ils pouvaient être les guides suprêmes de tout un peuple. C'est marrant, d'ailleurs, ces dictateurs qui sont souvent des petits mecs bien nerveux.

"Tout le monde a sa mitraillette et sa pelle ?"

Sublime n'est pas seul. Son fidèle Plonk, conseiller militaire souffre-douleur qui a bien souvent peur de finir exécuté s'il dit quelque chose que son chef interprêtera de travers. Goémon, conseiller politique (c'est marrant tous ces conseillers pour un type qui n'écoute jamais personne) qui s'en tire en accusant les autres et en étant assez malin pour ne jamais s'attirer les foudres du boss. Ou encore ce dictateur africain, le seul "moricaud marron d'Afrique sympa", qui va donner des conseils en communication pour tyran fasciste. Une galerie de personnages qui permettent à Fabrice Erre de faire grincer des dents sur tout un tas de sujets, la famine, les génocides ou encore le terrorisme. Que des bonnes raisons de bien se marrer.

Alors forcément, cette BD n'a pas une vocation dénonciatrice plus équivoque. Les dictateurs c'est le mal, le totalitarisme aussi. On espère qu'il vous apprend rien quand même. Le but de Fabrice Erre est surtout de montrer que l'on peut rire de tout. Même des membres les plus horribles de l'humanité. D'ailleurs, la fin est un ultime retournement de l'humour méta où il brise allégrement le quatrième mur pour bien nous montrer que là où il faut avoir le plus d'humour, c'est à son encontre et que même les caricaturistes peuvent être ridicules. Et surtout, qu'il faut savoir en premier lieu rire de soi-même. Avec un peu plus d'auto-dérision, le monde irait sans doute beaucoup mieux.

En prenant pour sujet pour sa BD satiriste un dictateur dans la plus pure tradition de l'horreur, on aurait pu penser que Fabrice Erre voulait faire dans la dénonciation outrée. En fait, il veut surtout nous faire marrer. Parce que le rire permet de tout désamorcer et qu'il est l'arme ultime contre les horreurs du monde. Et c'est déjà pas mal !

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