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par Elsa - le 9/12/2014
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par Elsa - le 9/12/2014

Le Teckel, la critique

D'abord publié dans Professeur Cyclope, Le Teckel d'Hervé Bourhis s'est offert une version papier il y a quelques semaines. Une nouvelle occasion de découvrir cette hilarante aventure.

Improbable roadtrip.

Le lancement de l'anti-douleur Marshall 2 est délicat, alors même que sa version précédente est accusée d'avoir provoqué des centaines de décès. Jérémy Labionda, jeune recrue du laboratoire Duprat, doit travailler en équipe avec Guy Farkas, alias Le Teckel, doyen des visiteurs médicaux. Officiellement Guy va lui apprendre le métier, mais en coulisse, Jérémy est chargé de faire un rapport sur les méthodes de travail du Teckel, dont les résultats sont en chute libre depuis des mois.

C'est ainsi que démarre cet imprévisible roadtrip en CX break, régulièrement interrompu par les rendez-vous avec des médecins pas vraiment convaincus que le M2 soit moins nocif que son prédécesseur.

"Mais pourquoi 'Le Teckel' ?"

Parvenir à écrire une histoire aussi drôle que riche en rebondissements avec comme héros deux visisteurs médicaux ressemble à un sacré challenge, mais Hervé Bourhis s'en sort avec brio. Il y a d'abord ce duo, mais aussi tous les autres personnages qui les entourent, tous plus barrés les uns que les autres. Caricaturaux, mais uniquement pour le meilleur, on se demanderait presque comment ils ont tous pu vivre leur vie si normalement jusque là, avant que tout se mette à déraper.

Le Teckel cite Rimbaud à toutes les sauces, mais il ne le fait que pour épater la galerie, et mettre les femmes dans son lit. Il avait l'air d'un vieux ringard, il se révèle charismatique, séducteur, cultivé, caractériel, amateur de cigare et de bonne chair, et légèrement psychopathe. On l'adore ou on le déteste, mais Guy Farkas ne laisse personne indifférent.

Les dialogues imaginés par Hervé Bourhis sont un vrai régal. Teintés d'humour noir, ils dressent le portrait au vitriol d'une société où l'appât du gain fait passer toute humanité au second plan. Pourtant, si on rit beaucoup, l'auteur parvient à glisser entre les lignes les blessures des uns et des autres, et à les rendre touchants même quand ils sont au premier abord absolument antipathique.

Le rythme du récit ne nous laisse pas beaucoup de répit. Vous pensiez la vie d'un commercial plan-plan ? Dîner au restaurant de l'hôtel devant la diffusion d'un match de foot, petite sortie en boite de nuit, partie de chasse et même argumentaires commerciaux, le quotidien de Guy Farkas est celui d'un véritable aventurier. Parce que ce qui compte, ce n'est pas ce que l'on fait mais comment on le fait. Et quelle que soit la situation, le Teckel y met du panache. Le fait que l'histoire ait d'abord été publié par épisode crée un rythme intéressant et enlevé. Néanmoins, cela oblige aussi l'auteur à une certaine densité qui provoque quelques raccourcis. Un ou deux passages nécessiteront peut-être de revenir quelques pages en arrière pour suivre tous les rapports entre les personnages.

Le dessin est efficace, épuré, mais dynamique et élégant. La mise en scène est redoutablement efficace, et les postures, les regards, les focus improbables ou certains éléments de décor rajoutent encore à la drôlerie de l'ensemble. La colorisation, en bleu et beige, suffit à donner un aspect en même temps énergique et un peu rétro aux planches. Un choix parfait pour ce personnage en fin de carrière qui nous réserve pourtant bien des surprises.

Le teckel est une bd déjantée, remplie d'action, d'inattendu et de personnages que l'on va adorer détester. Un regard très cynique, mais réaliste, sur l'industrie pharmaceutique et ses acteurs. Une ode aux VRP, un road trip tragi-comique, une vibrante histoire de transmission.

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