On pourrait croire que mettre en scène des chats est une thématique réservée aux auteurs de mangas, chez qui les titres sur ce sujet se comptent par dizaine. Mais voici que des auteurs de franco-belge s'y mettent aussi, avec Léonid tout juste sorti chez Soleil.
Chat d'intérieur...
Léonid a un toit au-dessus de sa tête. Il n'est plus un chaton, mais pas encore tout à fait adulte. Et si ses amis, qui vivent avec lui, aiment le confort de leur intérieur, lui passe ses journées dehors, avec des chats plus sauvages. Celà lui vaut l'incompréhension d'un côté (pourquoi aller se confronter aux dangers quand on a la sécurité et une gamelle bien remplie ?), les moqueries de l'autre (pour ceux habitués à vivre à la dure, il a des manières bien précieuses), mais il s'en moque. Sa vie lui convient parfaitement.
Enfin... jusqu'à maintenant. Deux agneaux tout juste nés ont été égorgés cette nuit, et de mémoire de vieux chats, la dernière fois que c'est arrivé, le fermier, en rage, a lâché ses deux chiens sur tous les matous des environs. Une véritable hécatombe, aussi tragique qu'injuste, qui semble sur le point de se reproduire...
... mais courageux !
Léonid est à la fois une enquête et un récit d'aventure. Le souci, c'est qu'il est un peu difficile de trouver à quel lectorat cette bande dessinée s'adresse. Quelques passages, réalistes certes, s'avèrent un peu violents pour un jeune lectorat. Pourtant le thème, et le trait rond et expressif (le dessinateur a étudié à l'Académie Disney), font penser à un titre jeunesse... Disons donc que Léonid s'adresse à des enfants pas trop impressionnables, et à des lecteurs plus âgés que l'idée de lire une aventure féline séduira.
Partant de là, Léonid est un récit riche en rebondissements, bien rythmé, qui évoquera ces tristes périodes où les histoires de bêtes mystérieuses tuant brebis et autres animaux de fermes déclenchaient colère et peur parmi les hommes, amenant à des abattages aveugles et cruels. Léonid découvrira le vrai coupable, mais ne pourra pas compter sur grand monde pour arrêter ses agissements. Les chats comme les hommes pensent souvent à leur sécurité avant le reste. L'histoire joue d'ailleurs habilement sur les caractères et réactions des chats de la vraie vie pour imaginer leurs actions et dialogues. Sans trop vouloir spoiler, le récit prend une tournure assez inattendue, on est assez curieux de voir comment il évoluera dans le prochain tome.
Le dessin attire dès la couverture, et à raison : il est superbe. Le trait est fin, le design des personnages très beau, leur conférant à chacun une personnalité forte dès leur première apparition. La gestuelle est également très réussie, donnant l'impression d'un dessin animé. Ils ont des gueules très expressives qui ajoutent de la profondeur à l'ensemble. On se régale à chaque page, même quand le récit devient plus sombre.
Si Léonid se cherche un peu en terme de lectorat, il n'en reste pas moins une bande dessinée belle par son graphisme, et riche d'une enquête bien menée, dont on est déjà curieux de connaitre la suite.