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par Alfro - le 3/06/2015
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par Alfro - le 3/06/2015

Mille Tempêtes, la critique

Terre d'accueil des bandes-dessinées de Tony Sandoval en France, les éditions Paquet dévoilent son nouvel ouvrage, Mille Tempêtes. Ceux qui connaissent déjà le travail du Mexicain ne seront donc pas étonnés de retrouver ici une nouvelle escapade entre mondes oniriques et réalité crue.

"Ojdre nous a convoqué."

Comme dans à peu près toutes les bandes dessinées de Tony Sandoval, les héros sont des enfants. Ici, il s'agit de Lisa, jeune fille un peu perdue, orpheline de mère et dont le père est parti on ne sait où. Elevée par sa marraine en compagnie d'un demi-frère cul-bénit qui semble effrayé par cette jeune fille qui respire et aspire à la liberté. En dehors de ces quelques éléments de repère, et le fait que l'histoire semble se dérouler dans un village proche de la mer, Sandoval n'expose rien et nous laisse fasse à une réalité fantasmée.

Ce qui ne va pas aider quand il va nous inviter de l'autre côté du miroir (un arbre en forme de lance-pierre ici), qui laisse découvrir une espèce de monde des esprits, ou une sorte d'enfer, ou encore un Avalon malsain. A vrai dire, c'est quand cette jeune fille qui est en proie aux affres de l'adolescence va découvrir ce monde onirique que cela va devenir très compliqué de suivre. Car si le premier niveau de lecture en ferait une histoire sympathique pour les enfants, jusqu'à ce que les pré-ado s'amusent à faire touche-pipi (explicitement sur la page), le deuxième niveau de lecture est bien trop évident pour qu'on puisse en faire abstraction.

"Ces êtres ne peuvent venir que de l'enfer !"

C'est ce second niveau de lecture qui va poser problème. Sans parler de l'intrigue en elle-même (qui reste dans sa structure très classique), l'auteur nous adresse des clins-d'œil forcés pour bien nous faire comprendre qu'il a plus à raconter que l'éveil d'une jeune fille à la sexualité ou que la réaction du village qui préfigure la morale bien pensante. Le problème, c'est qu'on est pas sûr de tout saisir. Comme si on avait affaire à un symbolisme à la Baudelaire avec une grille de lecture totalement personnelle et que l'on n'a pas forcément en main.

Peut-être qu'une connaissance plus étendue de l'œuvre Sandoval permet d'avoir les indices qui débloquent cette écriture par le symbole. On a aussi l'impression que l'auteur à un compte à régler avec la morale judéo-chrétienne, mais sert le propos dans un mélange étrange de Wicca et de légendes mexicaines agrémenter d'une mythologie toute personnelle. En gros, il m'a sans doute manqué beaucoup de références pour comprendre cette œuvre qui marche par association poétique. Reste le graphisme, qui oscille entre révulsion et fascination, si caractéristique de Sandoval. Techniquement, c'est très propre, il mélange les genres et prouve son aisance que ce soit en aquarelle ou au feutre.

Une BD de Tony Sandoval est toujours difficile à juger. Avec une narration onirique qui refuse de se laisser appréhender facilement, une histoire qui oscille entre le conte pour enfant et le récit malsain, et même un dessin ambivalent, l'expérience de lecture de Mille Tempêtes est presque une aventure en soi. Jusqu'à l'épilogue qui est le moment blockbuster, presque paradoxal avec le reste de la BD, qui vous fait marrer et livre quelques réponses (mais pas trop).

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