Ce mois-ci, la collection Neopolis de Delcourt s'enrichit d'un nouveau récit d'anticipation, le bien nommé Soleil Froid, qui se dévoile dans un premier tome plutôt très efficace, signé du scénariste Jean-Pierre Pécau et du dessinateur Damien, un duo déjà à l'œuvre sur Arcane Majeur, Jour J et le récent Cette Machine Tue des fascistes.
Cette fois, les deux artistes quittent les balises du genre historique pour une histoire plus tournée vers la science-fiction, mais qui reste pour le moins très crédible. Point de vaisseaux spatiaux ou d'aliens ou programme, mais plutôt un monde en proie à l'apocalypse, la faute à différents phénomènes, dont une mutation du virus de la grippe avière, bien que le terme ne soit jamais directement mentionné dans le récit.
C'est d'ailleurs la première remarque que l'on pourrait faire sur le scénarion de Péceau, qui s'avère construit aussi simplement qu'efficacement, dans un aller-retour permanent entre le présent et des flashbacks qui nous en apprennent toujours plus sur le monde dans lequel évolue désormais Jan, le personnage principal, sans jamais trancher définitivement sur le contexte développé par ce Soleil Froid. Le scénariste entretient ainsi suffisament de mystère pour nous tenir en haleine, tout en nous offrant un certain nombre de page-turners efficaces, nous incitant à avancer aux côtés du personnage principal.
Et sa quête ne manque pas d'un charme étrange, puisque les rebondissements sont ici faits de survivants de l'apocalypse, d'animaux transportant des maladies (et d'autres hybridés avec des machines) et de technologies avancées. Le tout porté par un imaginaire assez froid, certes, mais donc tout à fait en phase avec le propos développé.
Cet imaginaire, on le doit aux dessins de Damien. Plutôt inspiré, dans ses compositions qui laissent le décor Alpin nous sauter à la gorge, et dans son trait, assez classique mais lui aussi très efficace, le dessinateur nous sert de guide dans cette fuite en avant discrète et pleine de petits mystères. On déplorera toutefois quelques découpages parfois étranges, notamment dans les scènes d'action, mais aussi dans les transitions d'une page à l'autre, comme si le dessinateur manquait de pages.
Le constat s'étend également à quelques rebondissements élaborés par le scénariste, qui a parfois recours, dans ces 56 pages, à des stéréotypes assez vilains et vraiment injustifiés, si on se penche sur le nombre de cases leur étant consacrées. On imagine ainsi non sans mal que Soleil Froid aurait gagné à être un one-shot ou du moins à grossir en nombre de pages. Mais on ne boudera pas notre plaisir devant cette chouette histoire d'anticipation pour autant.
Si ce premier tome de Soleil Froid semble manquer de pages pour s'imposer comme un véritable immanquable de ce printemps, les écrits de Pécau et les dessins de Damien s'entendent toujours aussi bien, comme nous le prouve ce récit d'anticipation plein de mystères et assez bien foutu, qu'on à hâte de voir se déployer dans un futur album.