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par Sullivan - le 16/07/2014
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par Sullivan - le 16/07/2014

Songes, la critique

Projet le plus personnel de Terry Dodson (dessinateur star de Marvel et responsable de quelques merveilles sur les X-Men), Songes a bien failli devenir une arlésienne sans futur lorsque, entre 2004 (Coraline) et 2012 (Célia), l'Américain ne semblait pas trouver le temps d'avancer sur son délicieux bébé. Regroupée aujourd'hui au sein d'une belle intégrale pour 25€ seulement chez Les Humanoïdes Associés, la série se laisse enfin dévorer d'une traite, qui passe bien trop vite au vu du talent qui y est déployé.

Plus habitué à travailler avec des scénaristes américains amateurs de conquêtes spatiales et de robots tueurs, Dodson a découvert à travers Songes l'écriture polissonne de Denis-Pierre Filippi, un scénariste fidèle à l'éditeur qui offre aujourd'hui un bel écrin à sa série en deux tomes.

Confronté ici à la problématique de la sublimation de la femme à travers des planches toutes plus magnifiques les unes que les autres, le dessinateur offre une seconde facette de son art, celle où tout est soigné à l'extrême, où les brefs crayonnés laissent place à des finitions plus soignées que jamais et, surtout, où son amour pour l'imaginaire Européen classique fonctionne à plein régime. Ainsi, c'est dans un déluge de machines steampunk toutes plus dingues et fonctionnelles les unes que les autres que l'histoire vaguement érotique de Songes va prendre place.

Hérité d'une culture toute aussi classique que sa direction artistique, le scénario de Songes place Coraline, une préceptrice bien sous tous rapports et un tantinet coquine, dans la vie d'un maître de Maison maniaque, obsédé par la lecture, les inventions et l'âge adulte. C'est alors que son séjour au sein du Manoir prendra des atours inattendues lorsque, la nuit, cette dernière se retrouve propulsée dans un pays des rêves bien loin des standards du genre.

Ici, tout est prétexte pour un déluge de planches à vous en fêler la rétine, où Pirates, naufragés du Titanic et autres aborigènes cannibales se mêlent, alors que Coraline abandonne ses vêtements à mesure que les pages se tournent.

Mais plus que les formes généreuses de la magnifique Coraline, ou encore que l'histoire un peu convenue mais narrée avec minutie, c'est bel et bien l'explosion du talent de Terry Dodson qui fait de Songes un incontournable. C'est simple, l'auteur n'a sûrement pas son pareil pour magnifier les femmes avec tant d'académisme et de technique, là où d'autres seraient depuis longtemps tombés dans la vulgarité. Ici, les traits, les lignes, les personnages et les décors sont voluptueux et s'accordent tous parfaitement les uns aux autres. On regrettera toutefois un second volume plus en retrait en termes de dessin, où l'agenda américain trop chargé de l'artiste a sûrement pris le pas sur la patience de soigner parfaitement la seconde moitié de ce magnifique dyptique.

Songes est, à l'image de son dessinateur, à double tranchant. Coquine, presque désuète, cette immersion de Terry Dodson dans le monde du Franco-Belge est également fatale par sa criante beauté et son méta-propos sur le passage à l'âge adulte. Sans jamais se prendre pour ce qu'elle n'est pas, cette BD interpelle par son éxécution parfaite et sa douce ambiance, parfaite pour être lue dans un transat' sous le cagnard approprié.

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