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par Republ33k - le 27/07/2017
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par Republ33k - le 27/07/2017

Valérian et la Cité des Mille Planètes, la critique

Lors de la promotion de son dernier film, Luc Besson a souvent évoqué l'influence qu'avait eu l'Avatar de James Cameron sur son projet. Aux dernières nouvelles, c'est la sortie du film le plus riche de l'histoire qui l'avait incité à reprendre un stylo et un carnet pour réécrire Valérian, dont il possède les droits depuis longtemps déjà, même s'il n'avait jamais eu l'occasion, avant cette année, de donner vie à sa vision. C'est désormais chose faite, et à plus d'un titre, Valérian et la Cité des Mille Planètes est assurément notre Avatar national, puisqu'il affiche les mêmes qualités mais souffre aussi de défauts similaires.

Une fois n'est pas coutume, commençons par ceux-ci, et même le plus évident d'entre-eux, Dane DeHaan. Du haut de ses 31 ans, l'acteur nous a toujours bluffé par son jeu froid et ses yeux perçants, et il arrivait même à tirer son épingle du jeu dans des productions un rien douteuses comme The Amazing Spider-Man 2. Hélas, sa chance semble avoir tourné. Et si nous ne remettrons en cause ni la technique ni le potentiel du bonhomme, il faut avouer qu'il est à des années lumières du rôle que Luc Besson semble lui avoir écrit en s'inspirant bien évidemment du personnage de Christin et Mézières. Encastré dans une drôle d'armure, murmurant toutes ses lignes de dialogue et surjouant un côté cool qu'il n'a pas, l'acteur ne cesse de nous sortir du film, ou en tous cas, de briser l'alchimie avec Cara Delevingne, qui elle s'en sort beaucoup mieux, mais nous y reviendrons.

Mais à la rigueur, la faute est à partager entre DeHaan et Besson. Sans même parler des directions que le réalisateur aurait pu donner sur le plateau, son écriture est en cause. Elle ne parvient jamais vraiment à saisir Valérian, piégé quelque part entre le vaurien à la Han Solo et le soldat bien sous tous rapports, typique des films (de SF) avec Tom Cruise. Les dialogues du héros, mais aussi de la plupart des autres personnages, tombent ainsi à plat. Et pourtant, on sent à chaque plan l'enthousiasme de Luc Besson et son envie d'emmener le premier blockbuster français au niveaux des productions américaines. Hélas, le résultat n'est pas à la hauteur de ses ambitions du côté des dialogues, qui sonnent souvent faux, quand ils ne sont pas tout simplement en décalage avec la situation - la barrière de la langue a peut-être créé quelques distances, allez savoir. Dans le même ordre d'idée, le scénario manque lui aussi de soin, se perdant dans un trop-plein de concepts et de belles idées sans jamais prendre le temps de raffiner son intrigue et les relations entre ses personnages, qui traverseront un nombre incalculable de séquences sans provoquer quoi que ce soit, émotionnellement, chez le spectateurs.

Le script de Besson est ainsi un rail sur lequel sont lancés une quantité assez incroyables de wagons plein à craquer de séquences et d'idées fortes. Seulement, si l'immersion visuelle se fait très vite grâce à de jolis effets spéciaux et une belle photographie signée Thierry Arbogast - tous bien aidés par le visionnage en trois dimensions - l'immersion émotionnelle et/ou intellectuelle n'est jamais là. On pourrait prendre en exemple la séquence du "Big Market", un supermarché virtuel chargé de trouvailles visuelles et de concepts incroyables, mais qui finissent par assommer la narration, et par la même occasion, le spectateur. Pire, le film a tendance à expliquer et ré-expliquer les règles de son univers en permanence, alors que celles-ci ne sont pas toujours respectées par la mise en scène de l'action. Encore une fois, la séquence du supermarché virtuel risque de faire tomber les cheveux des spectateurs les plus curieux.

Cela dit, c'est aussi le contrat de base avec cette adaptation de Valérian, qui nous le fait signer dès sa superbe scène d'ouverture qui révèle les origines d'Alpha, la fameuse Cité des Mille Planètes. En quelques minutes et sur fond de David Bowie, Luc Besson nous promet en effet une aventure qui certes ne sera pas toujours captivante d'un point de vue narratif, mais qui est sensée stimuler notre imaginaire. Et la succession des différents aliens rejoignant Alpha était peut-être le meilleur moyen de nous le faire comprendre. Car les designs se suivent mais ne se ressemblent pas.  Parce que les costumes varient. Car les environnements changent. Dans cette ouverture précisémment, mais aussi dans la majeure partie du film qui suit, qui nous propose un imaginaire complètement dingue ! Et c'est peut-être le plus bel hommage que pouvait faire Luc Besson à la BD parue chez Dargaud.

Un peu de chauvinisme ne faisant pas de mal, on pourrait même dire que le film met une claque à des années de blockbusters hollywoodiens de ce côté-là, tant l'émerveillement est au rendez-vous. Assurément, les plus nerds d'entre-nous auront l'impression de voir les plus beaux de leurs artbooks prendre vie l'espace de deux heures. Car pour le coup, Valérian se montre presque trop généreux en termes de concepts, d'idées et de trouvailles en tous genres, qui d'ordinaire, sont condamnés à rester sur le papier, censurés, s'il on peut dire, par des producteurs, des réalisateurs ou des studios craignant que l'originalité fasse fuir le spectateur. En un film, Luc Besson condense ainsi plus d'imaginaire que des franchises américaines entières.

Et c'est assurément la plus grande qualité de son film, même si on placerait Cara Delevingne pas loin derrière. En effet, Luc Besson à une histoire pour le moins complexe avec les personnages féminins mais semble vraiment avoir écrit le métrage pour l'actrice britannique, qui elle, est totalement convaincante dans son côté espiègle, malgré des dialogues au ras des pâquerettes et quelques scènes où son personnage est injustement en retrait. Hélas, même la motivation de Cara Delevingne et une appariton assez chouette de Rihanna - il faut le noter - ne sauvront pas le niveau de jeu global de ce Valérian, où la plupart des interprètes sont au mieux à côté de leurs pompes, au pire, pas concernés, Clive Owen appartenant visiblement à la dernière catégorie.

Moralité, ce Valérian brille par son côté européen, à savoir un foisonnement d'idées qui nous font vite oublier des dizaines de blockbusters privés ou dénués d'imaginaire. Mais il pèche par son côté américain, puisque le script, les dialogues et la direction de Luc Besson est encore loin de la machine bien huilée d'Hollywood, qui même dans ses productions les plus fades, parvient toujours à tenir une histoire, ou au pire, à arracher quelques sourires. Malgré tout, on ne peut s'empêcher de noter l'enthousiasme de Besson, qui réalise ici un rêve de gosse, et celui de Cara Delevingne, qui trouve un personnage à sa mesure. Est-ce que cela suffit à faire de Valérian un bon film ? Sans doute pas, mais à défaut, c'est déjà un bon moment chargé d'images et de concepts dingues, et c'est déjà pas mal.

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