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par Elsa - le 2/12/2014
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par Elsa - le 2/12/2014

Sunny tome 1, la critique

Amer Béton, Ping Pong, Gogo Monster... les mangas de Taiyou Matsumoto marquent immanquablement les esprits. Son trait, sa narration, les thèmes qu'il aborde font de lui un artiste à part, mais incontournable. Sunny, sa nouvelle série qui débute chez Kana, est une nouvelle pépite.

"Ici, c'est notre base secrète !"

SUNNY © 2011 Taiyou MATSUMOTO/SHOGAKUKAN

Le récit prend place dans un foyer d'accueil pour enfants. Il y a ceux qui ont été abandonnés, ceux qui peuvent voir occasionnellement leurs parents... En tout cas aucun d'entre eux n'a une vie vraiment facile. Leur quotidien est rythmé par l'école, et leur vie en communauté. Dans leurs esprits s'entrechoquent des soucis d'enfants, et des blessures plus graves et plus secrètes.

Souvent, les gamins, seul ou à plusieurs, vont s'assoir dans la Sunny, une vieille voiture en ruine entreposée dans le jardin, pour rêver d'ailleurs, et s'imaginer des aventures à mille lieux de leur réalité.

Taire les blessures.

Certains mangakas ont ce don pour nous raconter des personnages, plutôt qu'une simple histoire. C'est le cas de Taiyou Matsumoto et de Sunny. Avec Sei, fraichement arrivé, on est immergé tout de suite dans la vie au sein du foyer. Tout n'a pas commencé à la première page. Les protagonistes étaient déjà là avant nous, ils continueront d'être quelque part le jour où nous les quitterons. 

Mais l'auteur nous amène à leur rencontre, et ils sont d'une justesse touchante, bouleversante. Le mangaka raconte les enfants sans jamais les rendre clichés. Leurs mots sont souvent durs, ils sont spontanés, parfois naïfs mais pas autant que l'on pourrait le croire, cachent leurs blessures derrière des silences ou des fous rires et essaient de comprendre un monde qui ne leur offre ni facilité ni douceur. 

La narration est particulièrement maitrisée. Taiyou Matsumoto nous impose son rythme, et on s'y plie avec plaisir. Moment d'action, dialogues, instants plus contemplatifs, tout se mêle d'une manière enfantine, justement. Un âge où certains moment filent à toute allure quand un petit rien un peu ennuyeux semble interminable. Cette lecture, loin d'être linéaire, transcende les émotions, et nous rend la petite bande encore plus attachante, alors qu'on voit tour à tour le récit à travers les yeux de chacun.

Le dessin de l'auteur, reconnaissable au premier coup d'oeil, est vibrant, un peu fragile. Il emprunte autant au manga qu'à un franco-belge indépendant explorant le noir et blanc. Ses cases nous obligent à changer régulièrement de points de vue, entre plans larges, et focus sur des visages ou sur d'infimes détails qui racontent des histoires en parallèle ou créent des atmosphères, des ambiances. 

Le seul bémol de ce titre sur le fil, puissant et maitrisé, sera peut-être pour les habitués de l'auteur. Taiyou Matsumoto explore des thématiques récurrentes, et a une patte graphique reconnaissable au premier coup d'oeil. Ceux qui ont déjà lu plusieurs de ses titres pourront donc parfois éprouver un léger sentiment de redite, un manque de surprise, qui n'enlève rien à la qualité de l'oeuvre.

Sunny est un titre souvent dur, mais qui se partage entre ombre et lumière. Parfois drôle, souvent émouvant, il nous plonge avec justesse dans le quotidien d'enfants que le destin égratigne. Des vies où tout s'entremêle avec intensité, servis par une narration particulièrement maitrisée.

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