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par Alfro - le 12/07/2014
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par Alfro - le 12/07/2014

Zelphy - Tome 1 & 2, la critique

Après la Dark Fantasy, l'auteur d'Übel Blatt explore de nouveaux horizons. Ou presque. Le Space Opera fonctionnant avec les même codes et souvent la même narration que la fantasy, remplaçant juste les dragons par des croiseurs intergalactiques (on grossit le trait évidemment), nous arrivions en terrain conquis. Peut-être un peu trop d'ailleurs ?

"Mais c'est le Prince en personne !"

Nous avions vraiment voulu aborder cette œuvre pour ses qualités intrinsèques, en oubliant Übel Blatt et ne considérant que ce que nous avions sous les yeux. L'auteur ne nous a pourtant pas arrangé tant les points communs sont légions entre ses deux séries. Ainsi, nous découvrons un monde qui se remet lentement d'une guerre qu'il l'a ravagé. Si Etorouji Shiono remplace les vastes étendues d'un monde médiéval par une galaxie aux nombreux systèmes solaires, le système féodal qu'il met en place, avec des royaumes et de petits fiefs qui parsèment les étoiles, ne peut que nous rappeler son titre qui l'a fait connaître. Si bien que nous nous enfonçons gaiement dans le jeu des comparaisons. Ce qui n'est pas forcément à l'avantage de Zelphy. La mise de place de son histoire est ici beaucoup plus poussive et linéaire que ce qu'il avait fait dans son autre œuvre, où nous débarquions au beau milieu de l'action et où l'univers se découvrait à nous de façon organique.

Ici, il va aligner les épisodes un par un pour que nous en apprenions sur ce monde qui gagne en densité et en intérêt au fil de la lecture. Il faut lui mettre à crédit qu'il n'attend pas longtemps pour nous aligner avec un élément perturbateur qui va projeter le héros, Lysja, dans une tourmente d'événements qui se précipitent sur lui et sur le lecteur à une vitesse effrayante. Pourtant, nous ne pouvons pas nous empêcher de remarquer que le schéma arrivée-action-résolution-départ est répété encore et encore. Comme si l'action se devait de faire simple pour que nous ingurgitions tous les aspects qui vont peupler l'univers qu'il est en train de créer. Car Shiono a une imagination débordante, il ne se contente pas de faire de la science-fiction à la façon des autres mais réfléchit à chaque élément qu'il va insérer dans son histoire et va multiplier les petites trouvailles. Surtout que s'il pense aux plus petits aspects de son histoire, il n'en oublie pas pour autant de développer une réflexion à plus grande échelle sur l'Expérience Millénaire qui risque d'être la base de délires philosophiques bien sentis dans ce genre d'épopée(s) spatiale(s).

"Pourquoi tu tripotes mes coussinets ?"

À vrai dire, le principal problème ici se situe sur une structure narrative qui s'acharne à garder ses secrets alors que nous ne connaissons pas encore les enjeux qui motivent chaque personnage. Le héros n'a pour le moment que le seul désir de découvrir les vastes étendues étoilées et se laisse porter par le vent stellaire au gré de ses mésaventures. Comme on se doute que ce qui se trame dans l'ombre va bientôt le rattraper, on sait déjà que des les prochains volumes, l'histoire gagnera en densité. Il nous suffit alors d'apprécier ce que l'on a déjà sous les yeux et de remarquer déjà que Shiono est allé sur un registre beaucoup plus léger, avec un humour que l'on ne retrouve pas souvent dans Übel Blatt, avec parfois de vraies idées de génie comme cet exo-squelette canard de bain mécanique. Surtout, on découvre une galerie de personnage hauts en couleurs comme un chat pirate, une policière obsédée par son avancement malgré son sens aigu de la justice ou encore Pico Pico, une intelligence artificielle qui ressemble à un casier de vestiaire. D'ailleurs, ils contrastent avec le héros qui est pour le moment assez apathique, lui qui montre pas grand chose de son passé de Prince de la plus grande dynastie de la galaxie avant qu'elle ne soit réduite à néant par la guerre. Un peu plus de profondeur ne lui ferait pas de mal.

Par contre, quand on juge d'un manga d'Etorouji Shiono, on est obligé de passer par la case ébahissement devant son dessin. Encore une fois, il multiplie les trouvailles visuelles, des designs originaux dans un genre pourtant usé à l'extrême et un sens de la mise en scène encore jamais mis à défaut. Beaucoup moins versé dans le fan-service que lors des débuts d'Übel Blatt (il y en a quand même hein, faut se respecter !), il nous déchire la rétine avec le nombre de détails qui peuvent habiter les coursives de ces stations spatiales, s'acharne sur des designs qui doivent pas être des plus simples ensuite à mettre en action et se permet le luxe de mettre quelques monstres géants tels qu'il les adore, avec même l'un d'entre eux qui fait la taille d'une ville et voyage dans l'Espace tel un poisson dans l'eau. On ressent tout le plaisir que le mangaka a à explorer de nouveaux horizons et on est emporté par son enthousiasme et son histoire qui n'accuse aucun temps mort.

Zelphy souffre d'un début qui ne veut pas être indigeste mais qui en retour devient beaucoup trop dilué, notamment avec le cliffhanger du second volume, visible à des kilomètres. Pourtant, l'énergie qui se dégage de ces pages, l'univers qui ne cesse de s'enrichir et la multiplication des trouvailles, scénaristiques ou graphiques, nous laisse espérer une suite de très haute volée qu'il faudra suivre de près si Etorouji Shiono décide de repartir dans une nouvelle saga épique au long cours.

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