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par Alfro - le 31/03/2015
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par Alfro - le 31/03/2015

Portrait de Légende #10 : Gerry Conway

La semaine prochaine, Comicsblog.fr sera tout entier consacré à Daredevil, personnage qui aura attiré à lui quelques-uns des meilleurs créateurs de comics de leurs époques respectives. Pourtant, les Frank Miller, Brian Bendis et autres Ed Brubaker nous font souvent oublier qu'avant eux, un certain Gerry Conway avait déjà contribué à la popularité de ce héros, et à celle de bien d'autres.

Gerry Conway appartient en quelque sorte à la seconde génération d'auteurs à sortir des blocs de Brooklyn. Il y nait en 1952 et va très vite admirer ces artistes qui ont grandi dans le même quartier que lui quelques années auparavant, il dévore les travaux de Will Eisner ou Joe Kubert tout en passant devant les lieux où ceux-ci grandirent. Partout où il va, il est baigné par le leg de ces pionniers des comics de super-héros.

D'ailleurs, le jeune Gerry dévore les aventures de ces héros modernes en cape et collants, une passion dévorante qui n'a d'égale que celle qu'il porte aux histoires d'horreurs, seuls ouvrages qui le tirent loin de la lecture des comics qu'il achète scrupuleusement chaque semaine. Si bien qu'il va prendre la plume à quatorze ans pour écrire une lettre à Stan Lee qui sera publiée dans les pages de Fantastic Four #50 en 1966. Il apprécie plus particulièrement Marvel dont il a pu suivre les débuts et son explosion dans les kiosques.

Deux ans plus tard, on le retrouve encore dans les pages d'un comics, mais en tant que scénariste cette fois-ci. Il a 16 ans, et il vient de publier son tout premier travail professionnel. Six pages qui sont publiées dans House of Secrets #81, un titre anthologique de DC Comics, et qui lui permettent de mélanger ses deux passions, comics et horreur. Alors qu'il est encore au lycée, il commence sa carrière et ne compte pas s'arrêter en si bon chemin. Ce recueil anthologique va accueillir plusieurs de ses histoires dans les mois qui suivent.

L'année suivante, il est toujours au lycée mais va rajouter Chamber of Darkness et Tower of Shadows à son palmarès, deux autres titres anthologiques d'horreur mais qui sont publiés par Marvel cette fois-ci. Alors qu'il révise pour son diplôme de fin d'études, il a prévu de rentre à l'université de New York par la suite, il va contribuer pour la première fois à la continuité d'un super-héros, mais sans en oublier sa passion pour les ambiances horrifiques, puisqu'il va avoir la chance d'écrire un numéro de The Phantom Stranger.

C'est à cette période qu'il va rencontrer Roy Thomas, qui est alors scénariste de The Avengers, éditeur et bras droit de Stan Lee. Le créateur de la Vision est alors extrêmement surpris de voir que cet auteur dont il voit le nom depuis deux ans sur des couvertures de comics de DC est un adolescent qui vient tout juste de terminer le lycée et qui suit avec peu d'intérêt ses premiers cours à la fac. Il va alors le prendre sous son aile et lui demander d'écrire encore et encore pour l'aider à s'améliorer. Stan Lee et Thomas débattent du talent du jeune homme et si le second est plus enthousiaste que l'éditeur en chef de Marvel, au bout de quelques dizaines de scripts ils s'accordent pour lui laisser écrire sa première histoire, qui porte sur le personnage de Ka-Zar. Il vient tout juste d'atteindre la majorité.

Après ce premier essai, Gerry Conway va se voir confier la série Daredevil sur laquelle il va rester deux ans. Le résultat est si fructueux, le personnage ayant du mal à décoller depuis le départ de Gene Colan jusqu'à ce qu'il le redynamise, que Stan Lee a désormais totalement confiance en lui. The Man va lui confier coup sur coup Iron Man, The Incredible Hulk et Amazing Adventures, un titre abritant deux séries, l'une consacrée aux Inhumains, l'autre à Black Widow. Il mène toutes ces séries de front et devient l'un des scénaristes les plus prolifiques de Marvel.

En peu de temps, Conway est devenu un élément indiscutable de Marvel, il va même co-créer avec Stan Lee et Roy Thomas le personnage de Man-Thing, ayant toujours à l'idée ces personnages d'horreur qu'il aime tant. D'ailleurs, le scénariste n'arrive pas à ce défaire de son autre passion et va demander à Roy Thomas de pouvoir la liberté créatrice pour ramener ce genre au sein de Marvel. L'éditeur lui donne sa bénédiction et l'on découvre deux petits chefs-d'œuvre des comics des années 70 qui naissent sous la plume du petit génie : Werewolf by Night et The Tomb of Dracula. Non seulement ces titres font un carton, et donne un bon prétexte à Stan Lee de faire la nique au Comic Code Authority dont il a secrètement prévu de s'en défaire peu à peu.

Devenu scénariste-star de ce début des années 70 chez Marvel, Gerry Conway hérite d'une charge aussi prestigieuse que périlleuse, l'écriture de la série Amazing Spider-Man qui est à l'époque le porte-étendard de la maison d'édition. Il vient d'avoir 19 ans et doit imaginer les aventures du héros favori des fans qui réunis chaque mois des milliers de lecteurs. Il est même le premier scénariste à succéder à Stan Lee, ce qui rajoute à la charge symbolique. Bien accompagné du dessinateur John Romita (père), il va livrer l'une des histoires les plus fondamentales de l'histoire de Peter Parker, mais aussi des comics puisque plusieurs historiens marquent le début de l'âge de bronze à ce moment-là. En effet, dans Amazing Spider-Man #121, il va faire mourir Gwen Stacy. Une mort sur laquelle il ne vaut mieux ne pas revenir, sous peine de s'attirer les foudres des fans, même quand on triche avec des clones. La version Spider-Gwen passe encore, elle vient d'un univers parallèle et ne remet pas en cause cette mort à fort taux émotionnel pour le lectorat.

Après cet arc majeur, qui aura fait couler énormément d'encre, John Romita Sr. quitte le titre pour laisser la place à un autre dessinateur de génie : Ross Andru. Ce qui inspire visiblement Gerry Conway puisque huit numéros après avoir tué le premier amour de Peter Parker, il va créé le personnage du Punisher, qui est alors un ennemi du Tisseur. Il va aussi participer à l'un des projets les plus ambitieux de l'époque, qui nait alors qu'il dîne avec Steve Englehart et Len Wein, qui sont alors scénaristes pour Marvel et DC Comics. Ils imaginent une histoire réunissant les deux éditeurs qui commence dans Amazing Adventures #16 avant de continuer dans Justice League of America #103 pour se conclure dans Thor #207, Conway se chargeant de ce dernier numéro. Il va d'ailleurs écrire pendant quelques mois pour DC Comics à cette époque, le temps d'introduire le personnage de Power Girl. Il retourne chez Marvel pour en devenir éditeur en chef en 1976, il a alors 24 ans, mais abandonnera le poste au bout de deux mois au profit d'Archie Goodwin, préférant la charge de scénariste. Il va écrire pour les deux majors et on trouve son nom aussi bien sur la couverture de The Avengers ou des premiers numéros de Ms. Marvel que sur celle d'Action Comics.

L'année de l'explosion punk londonnienne, 1977, est aussi celle où Gerry Conway va signer un contrat d'exclusivité avec DC Comics, ces derniers étant bien content de mettre la main sur le jeune prodige des comics. Ils vont lui confier de très nombreuses séries, Superman, Wonder Woman ou La Légion des Super-Héros. Surtout, il va se voir confier Justice League of America qu'il écrira durant huit ans, jusqu'en 1986. Le scénariste désormais confirmé va aussi lancer de nouveaux titres, créant pour l'occasion de nouveaux héros qui deviendront des figures d'importance de DC, comme Firestorm ou Steel.

Conway va aussi hériter du titre le plus important de DC Comics : Batman. Il va en profiter pour laisser une fois de plus sa marque, apportant quelques petites révolutions dont il a le secret, en créant l'affreux Killer Croc premièrement, mais surtout en introduisant le personnage de Jason Todd qui va devenir le nouveau Robin, succédant ainsi à Dick Grayson qui portait le costume du sidekick du Chevalier Noir depuis ses débuts. C'est aussi à cette période qu'il retrouve son mentor, Roy Thomas, qui vient lui aussi de rejoindre DC. Ils collaborent ensemble sur plusieurs comics, dont Swordquest, qui est distribué avec le jeu éponyme qui sort alors sur Atari 2600.

C'est le début de la diversification pour les deux amis scénaristes, qui vont alors regarder au-delà du seul médium des comics. Ainsi, ils vont coécrire Tygra, la glace et le feu, un long-métrage d'animation réalisé par Ralph Bakshi à partir des personnages créés par le légendaire illustrateur Frank Frazetta. La fantasy leur plait et profitant de la connaissance encyclopédique de Thomas pour l'œuvre de Robert E. Howard, ils coécrivent l'histoire de Conan le Destructeur, le film de Richard Fleischer qui nous permit de découvrir Arnold Schwarzenegger.

S'il ne quitte jamais vraiment le monde des comics, retournant chez Marvel au milieu des années 80 pour écrire deux séries Spider-Man, il s'en éloigne de plus en plus et s'intéresse désormais au petit écran où il va écrire, entre beaucoup d'autres, de nombreux épisodes de New York : Police Judiciaire et ses spin-offs. Il retournera de façon épisodique dans le monde des comics, écrivant notamment en 2009 The Last Days of Animal Man, une mini-série qui comme son nom l'indique plonge dans le futur d'Animal Man et raconte sa dernière aventure. Bien qu'il soit un vétéran chevronné de l'industrie des comics, le fait d'avoir commencé sa carrière très jeune fait qu'il n'est pas aussi âgé que les autres scénaristes du Silver Age. Notons qu'il est toujours actif puisqu'il a sorti il y a deux semaines Amazing Spider-Man #16.1, le premier épisode de sa nouvelle histoire sur le Tisseur qui montre qu'il a bien potassé ce qui s'est déroulé dans l'univers Marvel et qu'il est toujours aussi féru de continuité, évoquant avec brio le run de Dan Slott comme Shadowland. Un artiste aussi précoce que précieux, qui après cinquante ans de carrière continue d'imaginer de nouvelles histoires.

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