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par Alfro - le 4/04/2014
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par Alfro - le 4/04/2014

Les influences de Bleach

Si Tite Kubo n'aura pas passé énormément de temps avant de trouver le concept qui a inspiré la série qu'il porte depuis maintenant près de quinze ans, elle ne vient pas pour autant de nulle part.

Ainsi, comme toute œuvre, elle est la somme de ses influences. Kubo s'étant impregné des travaux de ses aînés, il a pu nous livrer une vision originale. Quelles sont donc ces œuvres qui ont fait que Bleach ait pu exister un jour ?

Alors que pour beaucoup de grands mangakas de shônen, l'œuvre fondatrice reste Astro Boy d'Osamu Tezuka qui en a définit le premier les codes, Tite Kubo a lui une préférence pour un autre de ces mangas pionniers, d'un auteur bien moins connu mais qui aura eu une importance cruciale sur l'imaginaire des mangas. Il s'agit ici de Kitaro le Repoussant (en VO : GeGeGe no Kitarô) de Shigeru Mizuki, série qui a déjà vingt ans quand Kubo la découvre dans sa jeunesse puisqu'elle est parue en 1959.

Mizuki est un mangaka qui aura eu une importance cruciale dans le genre, avec ses mémoires de la Seconde Guerre Mondiale, sa biographie contreversée d'Hitler (qui essayait d'en donner un portrait le plus complet possible en convoquant les différentes vies du Führer), un one-shot qui a par la suite inspiré les auteurs de Death Note pour faire leur célèbre série ou NonNonBâ qui reçut le prix du meilleur album d'Angoulême en 2007. D'ailleurs, à 92 ans, il continue d'accumuler les prix puisqu'il a été récompensé d'un Eisner Award en 2012 pour Onward Towards Our Noble Deaths, une semi-autobiographie qui raconte les derniers jours de l'armée japonaise à l'orée de la fin de la Seconde Guerre Mondiale.

Dans Kitarô, c'est un élément du folklore japonais qu'il va réintroduire et qui va par la suite créer tout un genre. En effet, il fait alors appel aux Yôkai, des esprits que l'on retrouve dans les légendes et contes. Ceux-ci peuvent prendre de très nombreuses formes et possèdent souvent des capacités de métamorphoses. Kitarô est l'un d'eux et déjà il va défendre le monde des morts tout comme celui des humains.

Il est dur alors de ne pas faire le parallèle avec Bleach, où les Hollows et Shinigamis ne sont autres que des formes de Yôkai font régulièrement le voyage entre l'univers des humains et celui de l'au-delà. Leurs capacités spéciales et les multiples transformations dont ils sont capables forment même un élément récurrent du manga. Le style graphique même de l'œuvre de Mizuki se retrouve dans les pages du shônen de Kubo, où de nombreux Hollows semblent inspirés par des personnages de cette série des années 50. Il est d'ailleurs assez troublant de faire le rapprochement en Kitarô et Urahara, ce dernier qui perché sur ses getas (sandales de bois) ressemble fortement au héros de ce manga qui a le premier troublé l'imagination du jeune artiste.

Une autre influence de Tite Kubo, bien plus connue et proche de nous, n'est autre que Saint Seiya. Le parallèle entre les deux œuvres est assez évident à faire et tient en deux points assez simple mais importants dans la construction des deux shônens.

Premièrement, ce qui a particulièrement frappé l'adolescent Tite Kubo quand il découvre l'œuvre de Masami Kuramada, c'est l'arsenal déployé et surtout la capacité qu'ont les héros d'upgrader leurs armures. Cela va devenir le système nerveux de Bleach. C'est un moyen très pratique pour le mangaka de matérialiser visuellement l'augmentation de la puissance de ses héros. Même si Kubo ira bien plus loin, puisque certains Bankai ou Resureccion n'ont plus grand rapport avec des armes et prennent des proportions dantesques.

Ensuite, ce qui va attirer l'œil de Kubo quand il découvre les aventures des Chevaliers de Bronze, c'est la construction narrative en une succession de combats. Difficile de ne pas rapprocher le Gotei 13 du Sanctuaire, même s'il faut reconnaître que Bleach se montre bien moins linéaire que son aîné. Narrativement, cela à l'avantage de mettre en exergue les motivations de ses personnages, tout en faisant monter une tension progressive. Ce qu'il va d'ailleurs totalement déliter au moment d'approcher l'arc du Hueco Mundo qui se perdra en batailles successives (on peut passer plusieurs tomes sans voir Ichigo ou presque).

Le dernier manga à être crucial dans la construction de Bleach est plus qu'une influence pour Tite Kubo. En effet, déjà fan de Dragon Ball, dont il s'est longuement entraîner à reproduire les personnages, le mangaka aura aussi vu l'auteur de ses lectures d'enfance lui tendre la main alors qu'il était au plus mal. Sa première série venait d'être annulée et le premier concept de Bleach qu'il avait proposé au Weekly Shônen Jump avait reçu un refus catégorique pour seule réponse. C'est dans un instant d'intense dépression nerveuse que Kubo vit Akira Toriyama  faire preuve de cette solicitude qu'on lui a si souvent prêté.

En effet, Toriyama a un statut assez particulier chez Jump où sa notoriété lui permet de jeter un œil sur tout ce qu'il veut. C'est ainsi qu'il est tombé sur le premier jet de Bleach qui comportait quelques idées en vrac et un design pour Rukia. Suffisament interloqué par ce qu'il voyait, il se dit sans doute qu'il y avait matière à faire mieux et écrit alors une lettre d'encouragement au jeune auteur qui ne savait alors que faire. Il lui conseilla alors de retenter sa chance après avoir affiné son travail, sentant le potentiel de celui-ci, et lui dit quelque chose qui marqua Kubo, que les méchants devaient être forts, effrayants et cools. Visiblement, le jeune auteur sait écouter ses aînés vu l'application qu'il a mis à créer parmi les meilleurs méchants des shônens. Si on a Aizen, Grimmjow ou Ulquiorra, c'est aussi grâce à Toriyama finalement.

Ce que le père de Sangoku ne savait sans doute pas à l'époque, c'est qu'il avait déjà marqué son successeur. En effet, Kubo fut particulièrement frappé par la scène où Trunks débarque pour la première fois. Ce jeune homme avec son épée (tiens donc) qui arrive au summum de sa classe est une image qui va toujours motiver le mangaka et il la gardera à l'esprit quand il fera Bleach.

Même si un artiste a tendance à puiser ses influences dans son art, il n'en reste pas là et s'imprègne de tout ce qui l'entoure. Il en va de même pour Tite Kubo. Ce dernier avait longtemps hésité entre la musique et le dessin, mais avait visiblement plus de talent pour le second. De son goût pour le rock, on va tout de même retrouver une flopée de références tout au long de Bleach. Déjà, rien que le titre du manga qui vient du premier album de Nirvana, mais aussi de nombreux titres de chapitres qui sont de petits indices qui indiquent les goûts musicaux de l'auteur.

Sinon, il a régulièrement déclaré que pour les découpages de ses combats, ce n'est pas le manga qui l'avait inspiré mais les films d'action et les westerns. D'ailleurs, sa première série, Zombiepowder, est un western retravaillé. Ce grand cinéphile a ainsi affirmé que pour les cadrages, il voyait d'abord des scènes de cinéma avant de voir des cases de bande dessinée; et que c'est ainsi qu'il imaginait les combats. Chose que l'on ressent à la lecture par le dynamisme et la clareté de scènes d'actions qui se déroulent pourtant à une vitesse ahurissante.

Enfin, pour ses différents personnages, on a sent qu'il va chercher des inspirations ci et là au gré de ses envies. Même si les Shinigamis sont inspirés par la littérature japonaise classique et que les Arrancars proviennent de la Santeria, religion qui agrége catholicisme et tradition animiste des Caraïbes, il a un champ de références bien plus élevé et divers. Pour forme d'exemple, Nnoitra est visiblement calqué sur Marilyn Manson ("Dope show is the new shit") ou Szayel-Aporro dont le look transformé nous fait penser à un Antéchrist qui aurait vu trop souvent Orange Mécanique. Le talent de character designer de Tite Kubo est sans doute l'un des plus marquants, et vient sans doute du fait qu'il s'imprègne de tout ce qui éveille sa curiosité.

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