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par Sullivan - le 27/01/2014
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par Sullivan - le 27/01/2014

Édito #6 : Que retenir du Top 25 des ventes de BD en 2013 ?

Derrière ses allures de tableur un peu austère, le très précis Top 25 des meilleures ventes de BD dressé par Livres Hebdo est très riche d'informations sur le monde de la Bande Dessinée, après le bel arbre qui cache l'immense forêt d'Astérix chez les Pictes en tête des ventes de livres en France

Et si l'on peut se réjouir de voir des chiffres aussi énormes autour des ventes engendrées par l'art séquentiel, alors que Dargaud, Glénat et Kana se partagent une grosse part du gâteau, nous sommes aujourd'hui en droit de nous demander dans quel sens avancent les cases et les bulles. 

Un seul Comic-Book (l'ogre Walking Dead, dont le premier numéro occupera bientôt les étagères d'un Français sur trois), un seul premier numéro en forme de One-Shot avec l'excellent Platon La Gaffe chez Dargaud, dix-sept entrées qui en sont à plus de 10 numéros, l'absence de quelques-uns des fleurons de l'édition tels que Ki-Oon, KSTR (et plus largement l'excellent Casterman qui ne place que l'ultra-reconnu Philippe Geluck dans ce top) et j'en passe. Les maux pourraient sembler nombreux mais plutôt que de fantasmer sur les soucis d'un milieu qui se porte plutôt bien malgré les avis les plus pessimistes et sensationnalistes, intéressons-nous aux enseignements qui se trouvent au sein de ce tableau, mais aussi en dehors. 

Avant toute chose, il est de bon ton de féliciter Blake, Mortiner et Astérix pour leurs scores stratosphériques même s'il faut bien leur demander de s'écarter quelques peu pour s'intéresser aux autres (vrais?) acteurs de la BD au quotidien. Avec One Piece et Naruto comme chefs de bord, Kana et Glénat peuvent se concentrer sur l'édition de Mangas que nous avons la chance de voir traduits en Français, et que nos cousins Européens nous envient. Les exemples sont tellement nombreux que je vous épargnerai la liste exhaustive de ceux-ci, et les langues pendues viendront poser la question qui mérite d'être avancée : "Jusqu'à quand Luffy et Sasuke pourront cacher les vrais chiffres d'un secteur qui semble à la traîne ?".

Peu importe, Kishimoto et Oda n'en ont pas fini avec leurs univers (parfois à notre grand dam, d'ailleurs) et ouvrent la porte à de nombreux jeunes auteurs qui progressent dans leur roue, dans l'attente du prochain Shonen capable de vendre des millions de bouquins. Si le manga se porte moins bien depuis quelques années, c'est surtout parce que les années qui les ont précédées ont été fabuleuses, avec Bleach et Fairy Tail comme locomotives d'un genre toujours aussi vendeur (et vendu). La réalité du marché est celle-ci : les éditeurs réimpriment régulièrement (jusqu'à pousser le vice de l'édition Deluxe pour un nombre colossal de séries qui n'attendent que ça), alors que les acteurs du marché qui n'ont pas des moyens de mastodontes s'en sortent la tête haute, en témoignent les belles histoires de Kurokawa, Ki-Oon, Pika et Kazé (sur lequel je serai plus mesuré en évoquant l'argent). 

Du côté des Comics, malgré une absence criante de ce tableur (il faut imaginer qu'un titre tel que Batman - La cour des Hiboux représente un tirage à 20-25 000 unités seulement), Urban Comics et Panini Comics se débrouillent très bien et montrent un visage bien plus flamboyant que celui que présentait le marché il y a encore quelques années, tandis que Delcourt s'appuie sur des titres indépendants forts et sur les deux cartons de librairie que sont Walking Dead et Star Wars

Reste l'épineux sujet du marché du Franco-Belge, qui souffre bien entendu de la surproduction, mais aussi d'une économie en dent de scie. Ankama souffre de difficultés et restructure malgré des qualités criantes et une identité incroyable en librairie (le Label 619 comme étendard), les petits éditeurs suffoquent et deux groupes (Delcourt/Soleil & Média-Participations - Dupuis, Dargaud, Le Lombard) se partagent une part largement majoritaire du marché si l'on écarte les Gaulois de l'équation. Ajoutez à ça des séries loin des intérêts des jeunes lecteurs dans ce Top 25 et vous obtenez un bilan qui sent bon le prozac. Et pourtant,  le véritable tableau est bien plus beau. Les jeunes talents pleuvent (et 2014 annonce des arrivées intéressantes pour le milieu, avec la nouvelle série d'Olivier Peru -bien accompagné dans cette aventure- notamment), les librairies indépendantes parviennent encore à vivre de leur métier et de leur passion, les éditeurs proposent un savant mélange de nouveaux titres aux qualités incroyables (le catalogue de Futuropolis en est l'exemple le plus criant), les gens se déplacent en masse en festival, d'excellents magazines naissent (Aaargh!, KaBoom...) et j'en passe.

Tout ne va pas bien dans le meilleur des mondes, mais à quelques jours d'Angoulême, le bilan à dresser du monde de la BD ne s'obtient pas seulement à partir d'un tableur et de chiffres qui font tourner la tête, ni à partir de lettres ouvertes ou de querelles d'égos sur les réseaux sociaux. Et tant mieux parce que finalement, la fête n'en sera que plus belle dès Jeudi prochain ! 

 

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