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par Alfro - le 18/05/2015
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par Alfro - le 18/05/2015

Édito #37 : La japanimation, un envers du décor pas si idyllique

Nous avons tous eu de grandes heures joie devant un animé, que ce soit les adaptations de Dragon Ball ou Saint Seiya, celles plus récentes de mangas en vogue ou même les créations originales telles que Kill la Kill ou Space Dandy. Des œuvres qui nous marquent par la somme de travail colossale que les animateurs japonais mettent dans chaque épisode et par l'inventivité de ces animateurs. Quand on voit le rapport entre les effectifs pour un studio américain et un studio japonais, on se dit que la débrouille a encore de l'avenir.

Pourtant, la NHK (principale chaîne de télé nipponne) a dévoilé une étude sur les conditions de travail qui existent au sein de ces studios. Le moins que l'on puisse dire, c'est que si on connaissait les conditions déplorables dans lesquelles travaillent beaucoup de mangakas, ils n'ont rien à envier à leurs collègues de l'animation. Déjà, si l'on observe la grille des salaires, il y plus un intérêt concret à être tout en haut de l'échelle sociale :

  • 2nd animateurs-clé : 1.127 million yen (US$9,392 par an)
  • Touch-up (shiage) animateurs : 1.949 million yen (US$16,268)
  • Intervallistes (ceux qui font que l'animation est fluide) : 2.607 million yen (US$21,726)
  • Animateurs-clé (genga) : 2.817 million yen (US$23,513)
  • Coloristes : 3.335 million yen (US$27,790)
  • Story-boardeurs : 3.723 million yen (US$31,030)
  • Animateurs 3D: 3.839 million (US$31,982)
  • Directeurs de l'animation: 3.933 million yen (US$32,776)
  • Character designers: 5.104 million yen (US$42,602)
  • Producteurs : 5.420 million yen (US$45,174) 
  • Réalisateurs : 6.486 million yen (US$53,960)

En gros, le réalisateur gagne à peu près 4000€ par mois tandis que ceux qui sont tout en bas de l'échelle, dont le travail consiste en grande partie à nettoyer les traits, effacer tout ce qui dépasse et finaliser l'ensemble, ne gagnent que 700€ par mois. Alors certes, il est normal que le réalisateur gagne plus que celui qui est à la toute fin du processus créatif. A vrai dire, là n'est pas la question, car si on considère objectivement les choses, 4000€ par mois n'est pas un salaire déraisonnable pour le travail abattu, et n'est pas (comparé à ses collègues étrangers) une somme mirobolante.

Par contre, le gars qui veut commencer à bosser dans le milieu va devoir sacrément s'accrocher et faire preuve d'une certaine abnégation. Le Japon ayant un coût de la vie relativement similaire à celui de la France (en un peu moins cher, sauf si vous êtes à Tokyo, merci l'effet capitale), dur de s'en sortir. Surtout si l'on met en parallèle avec les heures de travail abattues, qui donnerait des spasmes à Martine Aubry. En effet, la même étude a aussi regardé du côté du temps de travail, et c'est là où cela devient assez effroyable.

En effet, la moyenne se situe à 263 heures par mois. Pour les 35 heures, on repassera puisqu'on est sur une base d'une soixantaine d'heures à caler dans sa semaine. Pire, 15% des sondés dépassent les 350 heures par mois. Nicolas Sarkozy adorerait, les animateurs beaucoup moins. Le milieu est mortifère, des employés sans passion qui n'en peuvent plus. Pour un média qui fait rêver des milliers de spectateurs, le constat est triste. Shinichiro Watanabe (Comboy Bebop, Samourai Champloo) avait d'ailleurs fait exception en demandant à ses équipes de prendre des vacances quand il les avait senti au bout. Le problème, c'est que si un créateur comme lui, dans des studios comme Trigger ou Bones, peut se permettre ce genre de largesses, les exigeances des deadlines forcent les autres à imposer un rythme de travail dantesque.

Travailler comme un forcené pour un salaire de misère est le quotidien des animateurs et apparemment cela ne dérange pas tout le monde. L'ancien président de Madhouse estime en effet que les postes en dessous de l'animateur-clé ne devraient même pas avoir de salaire, que ce n'est qu'un entrainement au métier d'animateur. Si la réaction a provoqué un juste tollé, le fait qu'un grand patron pense de cette manière laisse peu de doute sur le fait que l'industrie n'est pas prête au changement.

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